Le calcul de dose permet de déterminer la quantité exacte de médicament à administrer en fonction d’une prescription médicale1, du poids du patient et de la concentration disponible.
L’acquisition et la maîtrise du calcul de dose font partie du standard de la pratique infirmière pour garantir l’administration sécurisée des traitements. En effet, 98 % des médicaments sont administrés par des infirmier(e)s2, d’où l’importance pour ces dernier(e)s d’acquérir cette compétence pour prévenir les erreurs, sécuriser le circuit du médicament et protéger les patients et leur santé.
Au quotidien, les infirmier(e)s réalisent des calculs de doses dans diverses situations, telles que la préparation d’injectables, l’administration de traitements per os, l’analgésie autocontrôlée (PCA) et l’utilisation de pousse-seringue électrique (PSE). Cependant, une erreur de calcul de dosage peut rapidement survenir et entraîner des conséquences graves, voire fatales, pour le patient.
Dans cet article, vous trouverez tout ce qu’il faut savoir sur les calculs de doses dans le cadre de votre apprentissage : cadre réglementaire, rappels mathématiques, méthodes de calcul (concentration, dilution, débit) avec des exemples corrigés, dispositifs médicaux, ainsi que des recommandations pour sécuriser l’administration des traitements. Nous aborderons également les spécificités du calcul de doses en pédiatrie et en gériatrie, avec des conseils pratiques de tuteurs/tutrices de stage et de formateurs/formatrices en IFSI, afin de garantir des soins sécurisés et adaptés à chaque prise en soins.
Cadre réglementaire infirmier des calculs de doses
Les calculs de doses sont l’un des critères d’évaluation de la compétence infirmière n°4 intitulée « Mettre en œuvre des actions à visée diagnostique et thérapeutique » : “Exactitude du calcul de dose”3. Ils impliquent la capacité des infirmier(e)s à administrer des traitements de manière précise et sécurisée, en respectant les prescriptions médicales et en garantissant la sécurité des patients. Ils sont également évalués en IFSI durant la première année : évaluation technique de l’unité d’enseignement 4.4 du semestre 2, intitulée “Thérapeutiques et contribution au diagnostic médical” lors de la préparation d’une thérapeutique à administrer par voie injectable, mais aussi dans diverses unités d’enseignements, comme l’UE 2.11, intitulée “Pharmacologie et thérapeutiques”.
L’infirmier(e) administre les médicaments dans le cadre de son rôle sur prescription, en se basant sur la prescription médicale et en tenant compte du conditionnement pharmaceutique et du mode d’administration. Cette responsabilité est encadrée par le Code de la santé publique, notamment les articles R4311-74 et R4312-295, qui imposent le respect strict des prescriptions et des protocoles.
Une erreur de calcul de doses peut avoir diverses origines (erreur de conversion d’unités, mauvaise compréhension des prescriptions, débit ou dose incorrects…). Elle peut compromettre l’état de santé du patient ainsi que la qualité des soins, car celui-ci reçoit une dose médicamenteuse inappropriée pendant une certaine période. Les effets pharmacologiques peuvent être sévères, soit parce que le problème de santé n’est pas traité de manière adéquate (on parlera alors de sous-dosage), soit parce que le principe actif est toxique en grande quantité dans le corps (on parlera donc de surdosage). Cette faute professionnelle du/de la soignant(e) peut causer une détérioration de l’état de santé du patient. Cela peut être une atteinte physique et/ou psychique, une aggravation de l’état de santé du patient, voire son décès. Les incidents répétés, parfois fatals, qualifiés d’événements indésirables graves associés aux soins6 (EIGS), représentent un problème majeur de santé publique.
La responsabilité infirmière en cas de faute d’administration de traitement est engagée. Selon l’article R4312-32 du Code de la santé publique : « L’infirmier est personnellement responsable de ses décisions ainsi que des actes professionnels qu’il est habilité à effectuer. Il ne doit pas exercer sa profession dans des conditions qui puissent compromettre son indépendance, la qualité des soins ou la sécurité des personnes prises en charge. »7 .L’infirmier(e) est tenu de respecter les prescriptions médicales et de veiller à leur bonne exécution. En cas de faute, telle qu’une erreur de dosage ou l’administration d’un médicament non prescrit, l’infirmier(e) peut être tenu(e) responsable en cas de conséquence sur la santé du patient. Cette responsabilité peut être engagée sur le plan civil, pénal et disciplinaire. Il est donc essentiel de suivre rigoureusement les protocoles et de vérifier les prescriptions avant toute administration de traitement. Cette vigilance permet de repérer d’éventuelles anomalies, de garantir la sécurité des patients et d’éviter d’éventuelles sanctions.
En résumé, les responsabilités infirmières dans les calculs de doses sont :
- Vérification des prescriptions médicales.
- Respect des protocoles.
- Gestion des erreurs et/ou des anomalies potentielles.
Rappels mathématiques et prérequis pour les calculs de doses
La conversion des unités de masse et de capacité
Qu’il s’agisse de doser un médicament, de calculer un débit de perfusion ou d’interpréter des résultats, les calculs sont omniprésents en pratique clinique. Les opérations de base comme l’addition, la soustraction, la multiplication, la division et la gestion des fractions sont des compétences incontournables.
Le tableau de conversion et d’unités fait partie des outils indispensables pour les infirmier(e)s lorsqu’ils/elles calculent les doses de médicaments. Les traitements sont généralement prescrits en différentes unités de mesure, et le dosage du traitement lui-même peut être dans une unité différente. Le tableau de conversion et d’unités permet aux infirmier(e)s de convertir ces unités avec précision pour garantir l’administration de la dose correcte.

Par exemple : Madame G. vous indique des dorsalgies avec une échelle numérique (EN) à 6/10. Le médecin vous a prescrit du Doliprane 1 g. Vous disposez de gélules de Doliprane dosées chacune à 500 mg. Selon le tableau de conversion, 1 g de Doliprane correspond à 1000 mg. Pour administrer la dose prescrite, vous devez donner à Madame G. deux gélules de 500 milligrammes chacune, car 500 mg + 500 mg = 1000 mg.
La conversion des unités de temps
Comprendre comment convertir les unités de temps est utile pour des actes et soins tels que la planification des soins, le calcul des doses de médicaments et la gestion des perfusions.

Par exemple : vous devez préparer l’injection d’un traitement par voie intraveineuse (IV) sur 24 heures.
- Pour avoir le nombre de minutes : 24 heures x 60 = 1440 minutes
- Pour avoir le nombre de secondes : 24 heures x 3600 = 86 400 secondes
Tableau récapitulatif des conversions essentielles
Voici quelques données à apprendre pour les calculs de doses et la conversion des unités en pratique infirmière :
Donnée | Équivalence |
Volumes et masses | |
1 litre | 1 dm³ |
1 mL | 1 cm³ |
1 kg | 1 litre |
1 cc (centimètre cube) | 1 mL |
1 gamma (γ) | 1 μg (microgramme) |
Unités de temps | |
1 heure | 60 minutes = 3600 secondes |
1 jour | 24 heures = 1440 minutes = 86 400 secondes |
Équivalences | |
1 cuillère à café | 5 mL |
1 cuillère à dessert | 10 mL |
1 cuillère à soupe | 15 mL |
1 mesurette de lait en poudre | 30 mL d’eau |
Le produit en croix
Le « produit en croix » ou la « règle de trois » permet de rechercher une inconnue à partir de trois données connues en s’aidant d’un tableau. Il faut définir et nommer le chiffre recherché en utilisant des unités comparables.

Exemple de calcul de dose avec la règle du produit en croix

Les unités internationales (UI)
Les unités internationales (UI) sont des mesures standardisées qui quantifient l’activité biologique d’une substance, comme les médicaments, vitamines et hormones, en fonction de leurs effets biologiques, et non de leur masse ou de leur concentration chimique.
Elles garantissent une uniformité mondiale dans les prescriptions et permettent de comparer les doses entre produits de différentes origines. Il faut comprendre que les UI ne se convertissent pas directement en grammes ou millilitres sans une référence spécifique. Vous devez être vigilant(e) pour administrer la dose exacte prescrite et vérifier les correspondances UI/mL sur les flacons.
Les UI sont spécifiques à chaque substance et ne sont donc pas équivalentes d’une substance à l’autre. Par exemple, 1 UI d’une vitamine ne sera pas la même qu’1 UI d’une hormone. C’est la même chose pour les familles de médicaments : les UI de Lovenox et d’héparine sodique ne mesurent pas exactement la même chose. Le Lovenox utilise une mesure anti-Xa spécifique, alors que l’héparine sodique est évaluée sur son activité anticoagulante globale.
On retrouve également les unités internationales dans l’utilisation de l’insulinothérapie. Il est important de noter qu’une UI ne correspond pas à 1 mL d’insuline. En effet, la plupart des insulines ont une concentration de 100 UI/mL. Cependant, depuis quelques années des insulines fortement concentrées sont apparues dans le domaine de la santé, uniquement sous forme de stylo pré-rempli, avec des concentrations qui varient de 200 à 300 UI par mL. Aucune conversion, aucun calcul de dose ne sont à effectuer, car 1 UI d’insuline reste 1 UI d’insuline quelle que soit la concentration : 100, 200 ou 300 UI/mL8. En résumé, la concentration en UI/mL varie selon le type d’insuline, mais la dose administrée en UI reste toujours la même, ce qui évite d’effectuer une conversion.
Comment calculer une concentration ?
La concentration est la quantité d’un produit actif dissous dans l’unité de volume d’une solution :
- Elle peut être exprimée en pourcentage (%) ou en unités de volume (g/L ; mg/L ; mg/mL…)
- Un produit dosé à X % signifie qu’il est composé de X grammes de produit actif pour 100 mL.
Par exemple : une ampoule de chlorure de potassium dosée à 20 % signifie que chaque 100 mL de solution contiennent 20 g de chlorure de potassium.
Les deux méthodes pour calculer une concentration
Il existe deux méthodes pour calculer une concentration :
Méthode 1 : la règle de proportionnalité
Cette méthode repose sur une règle simple et intuitive. L’idée est que si l’on divise le volume d’une solution, la quantité de principe actif se divise dans les mêmes proportions. Par exemple, si une solution contient 10 g de produit actif dans 20 mL, alors dans 10 mL (deux fois moins de volume), il y aura aussi deux fois moins de produit, soit 5 g. Ce raisonnement est rapide et permet généralement d’obtenir le résultat de tête, sans faire de calculs complexes.
Méthode 2 : la règle du produit en croix
On établit une correspondance entre la concentration d’une solution et le volume donné, puis on applique un produit en croix pour déterminer la quantité recherchée.
Cette règle est expliquée plus en détail dans la partie « Rappels mathématiques ». Le produit en croix est une méthode plus rigoureuse, surtout lorsqu’il s’agit de dosages plus complexes qui ne peuvent pas être résolus mentalement. Il est alors nécessaire de poser le calcul pour éviter les erreurs.
Exemple de calcul d’une concentration avec les deux méthodes

Comment calculer une dilution ?
La dilution permet de réduire la concentration d’un produit actif en ajoutant un solvant. Il existe deux types de dilutions :
- La dilution simple, pour préparer une solution moins concentrée, comme un désinfectant.
- La dilution d’une solution mère, pour ajuster la concentration d’un médicament injectable.
La dilution simple
La dilution simple consiste à réduire la concentration d’un produit pur en y ajoutant un solvant, comme de l’eau ou du sérum physiologique. Cela permet d’obtenir une solution moins concentrée, mais avec un volume plus important. Le produit actif est dilué, mais sa quantité totale reste inchangée : elle est juste répartie dans un volume plus grand.
Exemple du calcul d’une dilution simple :

La dilution d’une solution mère
Une solution mère est une solution qui contient déjà une concentration définie de principe actif. Certains médicaments injectables sont trop concentrés pour être administrés tels quels. Dans ce cas, ils doivent être dilués en ajoutant un solvant afin d’obtenir la concentration adaptée. C’est ce qu’on appelle une dilution de solution mère.
Dans certains cas, une seule dilution ne suffit pas. C’est là qu’intervient la double dilution, elle consiste à ajouter une première fois un solvant pour diluer la solution mère de façon à obtenir un volume possible à prélever pour la préparation. Cette solution, diluée une première fois, est diluée une deuxième fois avec un solvant pour la préparation de la seringue.
Pour calculer la dilution d’une solution mère, on utilise la formule suivante : C1 x V1 = C2 x V2
- C1 est la concentration initiale de la solution.
- V1 est le volume initial de la solution.
- C2 est la concentration finale souhaitée.
- V2 est ce que nous cherchons.
Exemple de calcul d’une dilution mère :

Comment calculer un débit ?
Le débit est la quantité d’un traitement administrée (médicaments, nutrition, sang, etc.) pendant une durée donnée.
Un débit excessif peut entraîner des complications de santé pour le patient, tandis qu’un débit insuffisant peut compromettre l’efficacité attendue du traitement.
Il existe deux unités de mesure couramment utilisées en fonction du matériel et de la précision recherchée :
- Le débit en gouttes par minute (gouttes/min) : utilisé pour les perfusions gravitationnelles classiques.
- Le débit en millilitres par heure (mL/h) : généralement utilisé avec les pousse-seringues électriques et les perfusions programmables.
Avant de voir les formules, il est important de connaître deux notions fondamentales :
Équivalences gouttes/mim selon le type de perfuseur
Il est important de noter que le nombre de gouttes contenues dans 1 mL varie en fonction du type de perfuseur utilisé :

La règle de l’arrondi
Lorsqu’une valeur de calcul ne donne pas un nombre entier, il faut l’arrondir correctement :
- Si le résultat est supérieur à 0,5, on arrondit par excès, par exemple : 66,7 devient 67 gouttes par minute.
- Si le résultat est inférieur à 0,5, on arrondit par défaut, par exemple : 66,3 devient 66 gouttes par minute.
- En revanche, si le résultat est exactement 0,5, il est généralement recommandé d’arrondir par excès, par exemple : 66,5 devient 67 gouttes par minute. Cependant, il est important de suivre les protocoles de l’établissement de santé ou les consignes du médecin, car certaines situations nécessitent des ajustements particuliers, comme dans le contexte pédiatrique.
Les deux méthodes pour calculer un débit
Calculer un débit en gouttes/min
Pour calculer un débit en gouttes/min, il faudra appliquer la formule suivante : débit (en gouttes/min) = (volume total en mL x nombre de gouttes/mL) ÷ durée en minutes. Voici un exemple de calcul de débit en gouttes/min :

Calculer un débit en mL/h
Pour calculer un débit en mL/h il faudra appliquer la formule suivante : débit (en mL/h) = volume total en mL ÷ durée en heures. Voici un exemple de calcul de débit en mL/h :

Les dispositifs pour les calculs de doses
Les PSE (pousse-seringue électrique) et PCA (Patient Controlled Analgesia) sont parmi les dispositifs d’administration médicamenteuse les plus couramment utilisés en soins infirmiers. Toutefois, il existe de nombreux autres équipements, que vous découvrirez progressivement lors de vos stages.
Le pousse-seringue électrique (PSE)
Aussi appelés seringues auto-pousseuses (SAP), ce sont des dispositifs électriques destinés à pousser sur le piston d’une seringue, reliée au patient par voie sous-cutanée ou intraveineuse, afin d’administrer un débit fixe en continu. Ces appareils permettent d’administrer un soluté ou un médicament en continu à débit constant. Le débit est toujours exprimé en millilitres par heure (mL/h).
La quantité à perfuser est toujours celle contenue dans la seringue (20, 50 ou 60 mL). En règle générale, le volume de la tubulure n’est pas comptabilisé, mais il peut toutefois contenir jusqu’à 2 mL, ce qui n’est pas négligeable, surtout dans le contexte pédiatrique.
Pour en savoir plus sur la préparation des PSE, des exemples concrets de calculs de doses et de bonnes pratiques d’utilisation, vous pouvez consulter notre article détaillé : Guide infirmier : pousse-seringue électrique (PSE).
L’analgésie autocontrôlée par le patient (PCA)
La PCA (Patient Controlled Analgesia), aussi nommée analgésie autocontrôlée par le patient, est un système permettant au patient de s’administrer de la morphine. Ce dispositif délivre un débit continu de morphine et permet au patient de s’auto-administrer des doses supplémentaires à la demande. Il s’agit d’une pompe de perfusion qui peut être utilisée par voie sous-cutanée ou intraveineuse (périphérique, chambre implantable, cathéter veineux central…).
Il faut utiliser des ampoules de même concentration sans les diluer, sauf si nécessaire, en maintenant des concentrations constantes (1, 2, 5 ou 10 mg/mL). La concentration doit être compatible avec le débit minimal ou la dose minimale du bolus demandé. Il faut effectuer un double contrôle des calculs et de la programmation de la pompe avant l’administration du traitement.
Le calcul de dose doit prendre en compte plusieurs paramètres, notamment la concentration du médicament, le débit continu (mg/h), la dose unitaire de bolus (mg), le délai entre deux bolus (période réfractaire) et le nombre maximal de bolus autorisés par jour.
Pour en savoir plus sur la mise en place d’une PCA, les paramètres à surveiller, les précautions d’utilisation et des exemples de calculs de doses, vous pouvez consulter notre article détaillé : Guide infirmier : PCA (Patient Controlled Analgesia) ou consulter le cours dédié aux calculs de doses sur la plateforme Réussis ton IFSI.
Sécuriser les calculs de doses
Lire et analyser une prescription médicale
Avant d’administrer un traitement, l’étape de la lecture et de l’analyse attentive de la prescription médicale est obligatoire. Les prescriptions médicales sont de plus en plus souvent informatisées dans le dossier du patient. Cependant, elles doivent être systématiquement datées et signées par le médecin prescripteur, afin de garantir la sécurité et la traçabilité des soins prodigués.
Pour ce faire, il faut identifier ces éléments de la prescription :
- L’identito-vigilance : nom, prénom, date de naissance du patient,
- le nom du traitement (DCI),
- la posologie,
- la voie d’administration
- la fréquence.
La posologie indique la dose exacte de médicament à administrer, la voie d’administration précise comment le médicament doit être administré (par voie orale, intraveineuse, intramusculaire, etc.), et la fréquence détermine à quel intervalle de temps le médicament doit être donné.
En cas de doute sur une prescription médicale, n’administrez jamais le traitement et effectuez les actions suivantes pour garantir la sécurité du patient :
- Revérifiez la prescription : relisez attentivement la prescription et vérifiez les anomalies potentielles.
- Consultez les ressources disponibles : utilisez les ressources disponibles comme les guides de médicaments, les protocoles de soins ou les bases de données médicales pour clarifier tout doute.
- Demandez conseil auprès de vos collègues infirmier(e)s : en cas de doute, sollicitez l’avis de vos collègues qui pourront vous apporter leur expertise et leur expérience. Si nécessaire, n’hésitez pas à demander l’avis du/de la pharmacien(ne).
- Communiquez avec le médecin prescripteur du traitement : en cas de doute persistant, contactez directement le médecin prescripteur pour obtenir des clarifications et des confirmations. La communication doit être directe, précise et documentée.
Appliquer la règle des 7B pour éviter les erreurs
Bien que la règle des 5B9 reste une référence incontournable en pratique infirmière et à l’IFSI, elle évolue vers la règle des 7B10, intégrant désormais le « bon débit » et le « bon professionnel ». Adoptée par certains établissements, cette évolution vise à renforcer la sécurisation de l’administration médicamenteuse, quelle que soit la voie d’administration (per os, IV, SC, IM…).
- Le bon professionnel : administrer le traitement avec les connaissances et compétences requises, en assurant la surveillance et la communication avec l’équipe soignante.
- Le bon patient : vérifier l’identité en posant une question ouverte “Pouvez-vous me donner votre nom, prénom et date de naissance, s’il vous plaît ?”, en lisant le bracelet d’identification et vérifiant la photo du dossier de soins notamment pour les patients présentant des troubles cognitifs ou des difficultés de langage.
- Le bon médicament : observer attentivement la DCI, l’étiquetage, l’aspect, l’intégrité et la date de péremption avant administration.
- Le bon dosage : vérifier la posologie du traitement prescrit en fonction de l’âge, du poids et de la voie d’administration.
- Le bon moment : respecter l’horaire prévu et assurer la traçabilité écrite de l’administration.
- Le bon débit : vérifier la vitesse d’administration selon la prescription (mL/h, gouttes/min, mg/h) pour éviter toute complication.
- La bonne voie d’administration : confirmer la voie prescrite (per os, IV, IM, SC…) et préparer les injectables au plus proche de l’administration (administration extemporanée) avec une identification claire.

Étiquetage des préparations
Une étiquette autocollante de perfusion pré-imprimée ainsi que l’une des étiquettes du patient sont mises systématiquement sur les perfusions : c’est obligatoire11 et cela permet la bonne réalisation des 7B. Ces étiquettes sont disponibles dans chaque service de soins. L’étiquetage doit être lisible, identifiable et adapté au format de la perfusion, comme ci-dessous :

La double vérification
La gestion des médicaments à haut risque, notamment les morphiniques et les benzodiazépines, nécessite une vigilance accrue pour éviter toute erreur de dosage. Un surdosage de morphine peut entraîner une dépression respiratoire sévère, et mettre en jeu le pronostic vital du patient, tandis qu’une administration excessive de benzodiazépines peut provoquer une sédation profonde, une confusion importante, voire une dépression respiratoire.
Pour réduire ces risques, les soignant(e)s appliquent la double vérification, un processus intégré à la gestion des risques. Ce contrôle croisé, réalisé de manière indépendante par deux professionnel(le)s de santé, permet de prévenir et de corriger les erreurs médicamenteuses.
La double vérification est nécessaire12 :
- pour les médicaments à haut risque13, les traitements injectables, et en règle générale pour toutes les préparations qui nécessitent une reconstitution,
- en cas de doute,
- et à chaque étape de la préparation à l’administration du traitement (prescription, analyse/dispensation, préparation, administration) ;
Cette procédure, recommandée par la Haute Autorité de Santé (HAS)12, tend à se généraliser dans les établissements de santé pour renforcer la sécurisation du circuit du médicament.
La variation de posologie selon la voie d’administration
La posologie d’un traitement varie selon la voie d’administration. Par exemple, la morphine intraveineuse (IV), rapidement active en raison de sa biodisponibilité élevée, nécessite des doses plus faibles que la morphine sous-cutanée (SC), dont l’absorption plus lente requiert un dosage plus élevé pour un effet équivalent.
Lorsqu’un changement de voie est nécessaire, l’équianalgésie permet d’ajuster la posologie pour garantir une efficacité analgésique identique. Cette conversion est essentielle lors du passage d’un opioïde à un autre (morphine, oxycodone, fentanyl, hydromorphone, méthadone) et repose sur des tableaux d’équianalgésie14 qui prennent en compte les différences de métabolisme et de voie d’administration. Ces outils sont particulièrement utiles en soins palliatifs et pour la gestion de la douleur chronique.
Toute modification de traitement doit impérativement être validée par un médecin. L’infirmier(e) doit assurer une surveillance rigoureuse et peut s’appuyer sur des outils comme Opioconvert15, développé par l’AFSOS, la SFAP et la SFETD, pour vérifier les équivalences de posologie et sécuriser l’administration du traitement.
Spécificités des calculs de doses en pédiatrie
Les calculs de doses en pédiatrie nécessitent une précision absolue en raison des différences physiologiques des enfants et du risque élevé d’erreur médicamenteuse. Les doses sont généralement calculées en fonction du poids (mg/kg) ou de la surface corporelle (mg/m²).
Administration des médicaments par voie intraveineuse (IV)
En ce qui concerne l’administration par voie intraveineuse, si la seringue contient exactement la dose prescrite, il est impératif de rincer la tubulure après l’administration du médicament. Cela garantit que l’intégralité de la dose prescrite atteint effectivement l’enfant, sans résidu dans la tubulure.
Lorsqu’un flacon ou une ampoule impose de préparer une quantité supérieure à la dose prescrite, une méthode différente est requise. Dans ce cas, il est possible de purger la tubulure jusqu’à ne conserver que la dose exacte nécessaire. Cela évite un rinçage supplémentaire et permet de ne pas surcharger l’enfant avec un volume excessif de liquide.
Dilution et calculs de doses chez le nouveau-né
Chez le nouveau-né, une attention particulière doit être portée à la dilution des médicaments. Une dilution excessive doit être évitée, car l’organisme fragile du nouveau-né ne peut pas gérer de grands volumes de liquide. A contrario, une dilution insuffisante peut affecter le métabolisme du médicament, et réduire ainsi son efficacité. Il est donc primordial d’ajuster le débit et la concentration du médicament en fonction de l’âge et du poids de l’enfant. Pour cela, il est recommandé de se référer aux protocoles de service ou aux guides tels que le VIDAL, afin de s’assurer que toutes les étapes sont suivies correctement et que le traitement est administré en toute sécurité.
Chez les nouveau-nés, les doses administrées peuvent se calculer en microgrammes (µg), nécessitant parfois des doubles dilutions, mais surtout un double contrôle pour garantir une manipulation sécurisée et minimiser les erreurs.
Par exemple : si l’on doit administrer 0,1 mg d’un médicament, il est possible de le diluer dans 10 mL de solvant pour obtenir une concentration plus maniable, soit 0,01 mg/mL (100 µg/mL).
Ce type de dilution facilite l’administration et diminue les risques d’erreur de dosage.
Spécificités des calculs de doses en gériatrie
Le calcul de dose en gériatrie est particulier en raison des modifications physiologiques liées au vieillissement. Chez les personnes âgées, plusieurs facteurs physiologiques et médicaux influencent la manière dont l’organisme métabolise et élimine les médicaments, ce qui peut entraîner des risques accrus d’effets indésirables.
Influence des fonctions rénale et hépatique sur le métabolisme des médicaments
Avec l’âge, la fonction rénale et hépatique diminue, réduisant l’élimination des médicaments. Une dose inappropriée peut provoquer une accumulation toxique dans l’organisme et exposer le patient à des effets indésirables graves. Il faut donc adapter la posologie en fonction de la clairance rénale et de l’état hépatique du patient.
Prenons l’exemple de Madame M., une patiente âgée de 85 ans, qui présente une insuffisance rénale modérée. Son médecin lui a prescrit du Doliprane (Paracétamol) pour soulager ses douleurs articulaires. Étant donné que la fonction rénale de Madame M. est altérée, la posologie de Doliprane doit être ajustée pour éviter une accumulation toxique du médicament dans le corps.
Polymédication et interactions médicamenteuses
Les personnes âgées sont souvent exposées à la polymédication, à savoir la prise simultanée de plusieurs médicaments, ce qui augmente le risque d’interactions médicamenteuses et potentialise des effets indésirables plus ou moins graves. Un calcul précis des doses permet de limiter ces risques et de garantir une administration sûre et efficace.
Les personnes âgées peuvent être plus sensibles aux effets indésirables des médicaments en raison de la fragilité accrue de leur état de santé. Un surdosage peut entraîner des complications graves, telles que des chutes, des troubles cognitifs ou des problèmes cardiaques et respiratoires. Vous pourrez trouver des informations dans l’unité d’enseignement 2.11 sur les traitements et les populations particulières.
Les conseils d’infirmier(e)s tuteurs/tutrices de stage
Jonas HAURET-CLOS
Voici quelques conseils pour éviter les erreurs dans vos calculs de doses :
- Lisez attentivement la prescription médicale jusqu’au bout sans vous précipiter afin de respecter la règle des 7B.
- Effectuez en temps réel la traçabilité écrite de l’administration. Juridiquement, un soin non tracé dans le DPI du patient est considéré comme non réalisé. Il faut donc effectuer une documentation rigoureuse pour être en conformité avec les normes légales et garantir la sécurité des patients. De même, un médicament non administré doit être consigné en justifiant la raison de la non-administration (par exemple : patient somnolent, troubles digestifs, refus, etc.).
- Il faut que vous ayez une idée de l’ordre de grandeur du résultat avant d’effectuer le calcul.
- En cas de doute, n’administrez JAMAIS le traitement au patient, car les erreurs peuvent être graves, voire fatales pour lui. Soyez le/la plus vigilant(e) possible.
- En cas de doute sur la prescription, demandez d’abord l’avis du médecin prescripteur. En outre, vous pouvez consulter un(e) autre professionnel(le) de la santé (infirmier(e), pharmacien(ne), etc.) pour un avis complémentaire et recherchez les recommandations de préparation et d’administration disponibles, telles que celles du VIDAL.
- N’hésitez pas à utiliser la calculatrice pour vérifier vos calculs : ce n’est pas interdit ! Cela permet de réduire les risques d’erreurs et d’effectuer une administration précise des médicaments.
- N’hésitez pas à réfléchir à voix haute : cela permet de clarifier vos pensées et d’éviter les erreurs. En verbalisant chaque étape du calcul, vous identifiez mieux les éventuelles incohérences ou erreurs avant d’administrer le traitement. Cela permet également à vos collègues de suivre votre raisonnement et de vous corriger si nécessaire, ce qui renforce encore la sécurité des soins.
- Exercez-vous régulièrement : que ce soit en IFSI ou en stage, révisez et pratiquez avec des exercices variés, utilisez des ouvrages d’exercices et de méthodologie (version de poche, guide du calcul…), des exemples concrets et des situations cliniques pour vous entraîner. Plus vous vous entraînerez, plus vous serez à l’aise avec les différentes méthodes de calcul. N’hésitez pas à travailler à plusieurs afin de vous aider mutuellement et à demander aux cadres de santé formateurs à l’IFSI des sujets et des cahiers de révision.
Alice CHAUVIN
Plus vous pratiquez, plus vous gagnez en aisance et en précision dans la réalisation de vos soins. Une bonne préparation est essentielle : prenez le temps de poser vos calculs avec rigueur et d’anticiper chaque étape.
Adoptez des dilutions et des concentrations simples pour limiter les erreurs et minimiser les manipulations. Veillez toujours à travailler avec méthode et à vérifier chaque étape du calcul.
Enfin, ne restez jamais seul(e) face à un doute. Faites vérifier vos calculs et votre préparation par un(e) collègue si nécessaire : la sécurité du patient est une priorité et le travail en équipe en est la clé. Des ressources fiables sont toujours à votre disposition, tels que les protocoles de service, protocoles d’établissement, recommandations nationales et le VIDAL.

Les conseils des formateurs et formatrices en IFSI
Sandrine BEUVELOT-BEIRNAERT
En cas de doute sur une prescription médicale, n’hésitez surtout pas à revenir vers le médecin prescripteur qui pourra vous donner tous les éléments nécessaires à la bonne réalisation de la prescription. En outre, n’acceptez jamais une prescription par conversation téléphonique. Même en situation d’urgence, la prescription devra toujours être rédigée par écrit dans le dossier du patient, en respectant les critères de sécurisation (par exemple : nom / prénom du patient, date, nom du produit, voie d’administration, dosage, moment d’administration, nom du prescripteur, etc.). Dans l’idéal, indiquez aux collègues et aux patients que vous êtes en train de préparer une ou des thérapeutiques (avec ou sans calcul de doses) afin de ne pas être dérangé(e). Les interruptions de tâches favorisent les erreurs ! Certains services utilisent notamment des gilets spéciaux appelés chasubles pour identifier les professionnels de santé qu’il ne faut pas déranger durant leur tâche. Utilisez-les sans modération.
Isabelle RAFFIN-BATAILLE
N’hésitez pas à revoir vos cours de mathématiques si vous rencontrez des difficultés. Pour ma part, je trouve utile de dessiner des seringues et des ampoules lors des exercices. Cette méthode peut être particulièrement bénéfique pour les personnes ayant une mémoire visuelle.
Christophe RUDIGCKO
Je vous conseille de maintenir de bonnes compétences en mathématiques de base, y compris les calculs mentaux, car la plupart des calculs de doses nécessitent un niveau de mathématiques équivalent à celui de l’école primaire ou du collège, ce qui peut être difficile en raison du manque de pratique des techniques fondamentales. En outre, utiliser une calculatrice est recommandé pour garantir la rapidité et la sécurité dans la mise en œuvre des calculs de dose, mais il est également bénéfique de s’exercer au calcul mental pour maintenir une agilité intellectuelle. De plus, il faut être attentif aux arrondis lors des calculs de doses, ceux-ci devant principalement se limiter aux calculs en gouttes par minute et rarement en millilitres par heure, puisque les perfusions en mL/h sont généralement programmées sur des pompes ou des pousse-seringues avec une précision allant jusqu’au centième de millilitre par heure.
Badia JABRANE
N’hésitez pas à créer des fiches mémo en version de poche pour les vitesses de perfusion en gouttes par minute (exemple : 1000 mL en 12 heures, débit de 28 gouttes par minute). En cas de résultat de calcul anormal, ne pas préparer le médicament. Demandez au médecin de confirmer la prescription ou refaites le calcul avec le médecin ou un autre professionnel de santé. Et enfin, avant tout calcul de dose, il est essentiel d’avoir une connaissance approfondie du médicament (classe pharmacologique, indications, posologie habituelle, mode d’administration, effets indésirables, etc.).
Remerciements
Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à Patricia Niant (cadre supérieure coordinatrice IFSI/IFAS), Sandrine Beuvelot-Beirnaert (cadre de santé formatrice en IFSI), Isabelle Raffin-Bataille (cadre de santé formatrice en IFSI), Christophe Rudigcko (formateur en IFSI), Badia Jabrane (directrice pédagogique en institut de formation paramédicale) et Alice Chauvin (infirmière aux urgences pédiatriques) pour leur relecture attentive de cet article et pour leur précieuse contribution.
Chez Réussis ton IFSI, nous nous engageons à proposer des contenus d’une fiabilité inégalée. En complément de l’expertise interne de notre équipe habituelle, nous valorisons l’apport de professionnels extérieurs qualifiés qui enrichissent nos articles de perspectives nouvelles et essentielles.
Sources
- Code de la santé publique « Article R4312-42 » version en vigueur depuis le 28/11/2016
- Inspection générale des affaires sociales « Rapport n° RM2010-098P de l’IGAS sur la Sécurisation du circuit du médicament à l’AP-HP » version de 07/2010
- Berger-Levrault « Profession infirmier- Recueil des principaux textes relatifs à la formation préparant au diplôme d’État et à l’exercice de la profession » Édition 2024
- Code de la santé publique « R4311-7 » version en vigueur depuis le 22/01/2025
- Code de la santé publique « R4312-29 » version en vigueur depuis le 28/11/2016
- Haute Autorité de Santé « Déclarer les événements indésirables graves associés aux soins (EIGS) » Mis à jour le 21/06/2022
- Code de la santé publique « Article R4312-32 » version en vigueur depuis le 28/11/2016
- Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (OMéDIT) Pays de la Loire « Focus sur : les insulines fortement concentrées » 07/09/2020
- Haute Autorité de Santé « Outils de sécurisation et d’auto-évaluation de l’administration des médicaments » Mis à jour le 31/03/2022
- Haute Autorité de Santé « Rapport de certification – Assistance Publique – Hôpitaux de Paris Hôpital Robert Debré » 07/2017
- Haute Autorité de Santé « Évaluation de la prise en charge médicamenteuse selon le référentiel de certification » 03/2022
- Haute Autorité de Santé « Flash sécurité patient – Calcul de doses médicamenteuses – La règle de trois doit rester la règle » 16/12/2021
- Institut pour l’utilisation sécuritaire des médicaments (ISMP) « Liste canadienne des médicaments de niveau d’alerte élevé » 29/04/2024
- Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) « Table pratique d’équiantalgie des opioïdes forts dans la douleur cancéreuse par excès de nociception » 21/10/2016
- Association francophone pour les soins oncologiques de support (AFSOS), la société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) et la société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD), « OPIOConvert »