Une analyse de sang (aussi appelée prise de sang ou ponction veineuse) est un geste courant qui a pour objectif d’évaluer le taux des composés sanguins d’un patient.
L’infirmier(e) doit être vigilant(e) lorsqu’il/elle prélève des échantillons de sang afin de garantir la sécurité du patient. Une mauvaise technique peut entraîner des résultats inexacts, des séjours prolongés à l’hôpital, des diagnostics tardifs et des traitements inutiles.1
Erreur de prescription, défaut d’identitovigilance, tube mal rempli… 60 à 75 % des erreurs en biologie surviennent en phase pré-analytique.2
Ce guide pratique du prélèvement de sang veineux à l’intention des étudiant(e)s et/ou infirmier(e)s explique le déroulement du soin pas à pas conformément aux bonnes pratiques et offre des conseils pratiques pour garantir la sécurité et le confort du patient. Il est indispensable de toujours se référer aux protocoles de l’établissement dans lequel vous exercez ou effectuez votre stage.
Si vous souhaitez connaître les prérequis du prélèvement veineux, nous avons publié un article qui couvre les aspects à prendre en compte pour un prélèvement sanguin réussi. Il comprend la législation, les indications, les contre-indications, le matériel, les informations cliniques pertinentes et les complications éventuelles.
Étape 1 : préparer le prélèvement sanguin
La phase pré-analytique est une étape déterminante du prélèvement sanguin veineux. Elle conditionne la fiabilité des résultats biologiques, la sécurité du patient et le respect des exigences réglementaires. Toute erreur à ce stade peut compromettre l’analyse réalisée par les automates et l’interprétation effectuée par les biologistes et entraîner des conséquences cliniques graves. Une préparation rigoureuse s’impose donc avant tout prélèvement.
Vérification de la prescription médicale et du dossier patient
Avant de préparer le matériel, commencer par vérifier minutieusement :
- La prescription médicale : s’assurer que les examens prescrits sont bien identifiés, qu’il n’y a pas d’erreur sur la prescription et si un caractère urgent est mentionné ou non.
- Le dossier patient : consulter les antécédents médicaux, les traitements en cours, les allergies connues (latex, antiseptiques…), les réactions antérieures aux prélèvements (malaise vagal, hématomes, douleurs), les particularités cliniques (port de dispositifs médicaux comme une voie veineuse périphérique, troubles cognitifs, anxiété marquée, phobie des aiguilles…).
- Les conditions pré-analytiques spécifiques : certaines analyses nécessitent un jeûne, un prélèvement à heure précise (ex. : dosage hormonal, bilan martial, cortisolémie), ou l’arrêt de médicaments interférents (anticoagulants, antibiotiques, antiépileptiques…).
Vérification rigoureuse de l’identité du patient (identitovigilance)
L’identitovigilance est une priorité absolue est une priorité absolue.
- Demander au patient de décliner spontanément son nom de naissance, son prénom et sa date de naissance.3 Éviter les formulations fermées (« Vous êtes bien M. Dupont ? ») qui peuvent induire en erreur, notamment chez les patients désorientés, malentendants ou anxieux.
- Croiser les informations avec : 4
- Le bracelet d’identification (en hospitalisation).
- La fiche d’identification du laboratoire ou du dossier médical.
- Une pièce d’identité (carte vitale, pièce d’identité valide) si disponible.
- Renforcer la vigilance chez les enfants, les patients non communicants, porteurs de troubles cognitifs ou en situation de handicap. Dans ces cas, vérifier l’identité en présence d’un tiers (aidant, proche ou professionnel(le) de santé) ou par deux soignant(e)s si nécessaire.
Analyse des risques
L’analyse des risques liés au patient permet de choisir une approche adaptée.
Pour un patient non communicant, désorienté ou atteint de troubles cognitifs :
- Adaptez votre communication en utilisant un langage simple, rassurant et approprié.
- Renforcez l’identitovigilance par une double vérification systématique.
En cas de difficultés d’accès veineux connues ou suspectées :
- Prévoyez l’utilisation d’un dispositif spécifique (vein finder, lampe infrarouge) afin de repérer les veines.
- Si nécessaire, sollicitez dès le départ l’aide d’un(e) professionnel(le) plus expérimenté(e) afin de limiter le nombre de tentatives et de garantir le confort du patient.
Étape 2 : recueillir le consentement du patient
Avant tout acte de prélèvement, le/la professionnel(le) de santé doit recueillir le consentement libre et éclairé du patient, conformément aux obligations légales et éthiques prévues par les articles L1111-2 et L1111-4 du Code de la santé publique.5 Cela suppose que le/la soignant(e) informe le patient de manière claire, loyale et adaptée à son niveau de compréhension. Pour un prélèvement sanguin courant, le consentement est oral, mais il doit être explicite, donné en toute connaissance de cause et réversible à tout moment. Il ne prend une forme écrite que dans des cas particuliers (actes à risque, examens génétiques, recherche biomédicale). Le/la soignant(e) s’assure que le patient a compris l’information délivrée, qu’il est capable de décider librement, et qu’il donne son accord pour la réalisation du prélèvement.
Lorsque le patient est mineur, le consentement est recueilli auprès des titulaires de l’autorité parentale (parents ou représentant légal), conformément à l’article 371-1 du Code de la santé publique6 et hors urgences médicales7. Toutefois, le mineur doit être systématiquement informé de façon adaptée à son âge et à son degré de maturité, et son avis doit être pris en compte chaque fois que possible7.
Étape 3 : préparer l’environnement et le matériel de prélèvement sanguin
Préparation de l’environnement
L’environnement de prélèvement doit répondre aux exigences d’ergonomie, de sécurité et d’hygiène pour garantir un geste efficace, confortable pour le/la soignant(e) et le patient, et sans risque infectieux.
- Choisir un espace calme, propre et bien éclairé, pour l’installation optimale du matériel et du patient.4
- Nettoyer et désinfecter le plan de travail avec un produit conforme à la norme EN 13697, en respectant le temps de contact indiqué.
- S’installer de manière stable, en position confortable, avec une bonne visibilité du site de ponction et un accès facile au matériel.
- Installer correctement le patient : position assise ou allongée selon son état clinique. Le bras dédié doit être dégagé (retirer manche ou vêtement couvrant), reposer sur un support stable, paume orientée vers le haut, en légère extension.
- Préserver l’intimité du patient et veiller à sa sécurité tout au long du soin.
Préparation du matériel
Le matériel de prélèvement doit être complet, stérile et prêt à l’emploi pour un geste sûr et efficace. L’organisation rigoureuse du poste de soin réduit les risques d’erreur, de contamination et d’interruption du soin.
- Vérifier la stérilité, la date de péremption et l’intégrité des emballages (aiguille, tubes, système de prélèvement, compresses, dispositifs d’asepsie…).
- Assembler le matériel : fixer l’aiguille ou l’unité à ailettes (de type butterfly) sur le support adapté (porte-tube ou corps de pompe).
- Disposer les tubes dans l’ordre de prélèvement recommandé.
- Organiser le matériel pour qu’il soit à portée de main, sur un plateau ou une surface propre désinfectée, en évitant les croisements de mains ou les mouvements inutiles pendant le soin.
- Porter les équipements de protection individuelle (EPI) adaptés, en conformité avec les précautions standards.
- Cas particulier des hémocultures : désinfecter soigneusement les bouchons des flacons avec des compresses imbibées d’alcool à 70 %, pendant au moins 30 secondes, en effectuant des mouvements circulaires, puis laisser sécher à l’air libre.8
Étape 4 : prévenir la douleur et adapter la communication avec le patient
Le prélèvement veineux peut générer inconfort, stress et anxiété, notamment chez les enfants, les personnes âgées et les patients phobiques. Il faut préparer et accompagner le patient, adapter la communication et mettre en œuvre des moyens de prévention de la douleur.
Commencer par présenter le soin de manière claire, rassurante et adaptée au profil du patient. Éviter les formulations anxiogènes comme « Attention, je pique ! », et privilégier des phrases positives et anticipatrices telles que « Respirez, j’y vais doucement. ». Prendre le temps de répondre aux questions posées et s’assurer que le patient se sent en confiance. Pour les patients non communicants ou désorientés, adapter la communication : utiliser un langage simple, maintenir le contact visuel, effectuer des gestes lents et doux, et, si nécessaire, solliciter la présence d’un accompagnant.
Pour limiter la douleur induite par le geste, plusieurs approches sont possibles :
- Distraction : conversation, musique, jeux, respiration guidée.
- Positionnement confortable du bras, sans traction ni extension forcée.
- Crème ou patch anesthésiants (de type EMLA®), MEOPA ou prémédication si prescrite.
Ces mesures, simples, mais efficaces, participent à la qualité du soin et au respect de la personne soignée. Il existe de nombreuses techniques pour réduire la douleur et l’anxiété des patients lors des soins.
Étape 5 : identifier la veine appropriée pour le prélèvement veineux
Utilisation correcte du garrot
Le garrot doit s’appliquer à proximité du site de prélèvement (environ la largeur d’une main).4
Le garrot doit être utilisé pour identifier la veine, cependant, il ne doit pas rester en place pendant le prélèvement sanguin, sauf si la veine est petite et difficile d’accès. Dans ce cas, il doit être serré modérément et le pouls radial doit être palpable.
Si vous laissez le garrot trop longtemps en place, les cellules « explosent », ce qui causera une hémolyse et/ou une hyperkaliémie, car il y a du potassium dans les globules. Ne pas le laisser en place plus d’une minute.9
Pour certains tests, le garrot ne doit pas être utilisé. Veuillez vous référer au protocole du laboratoire pour plus de détails. C’est notamment le cas du dosage du potassium d’un patient sous supplémentation potassique orale, car une hyperkaliémie fausse, induite par l’utilisation du garrot, pourrait conduire à une mauvaise interprétation du résultat et à des décisions thérapeutiques inappropriées.
Repérage de la veine
Une fois le garrot posé, pour repérer une veine adaptée au prélèvement veineux, combinez observation, palpation et utilisez si besoin des outils d’aide à la visualisation. Plusieurs critères et astuces permettent d’optimiser cette étape :
- Privilégier une veine droite, souple et palpable, même si elle n’est pas toujours visible à l’œil nu. Une veine « sensible au toucher » est généralement plus fiable qu’une veine simplement visible.
- Éviter les veines sinueuses, superficielles, bifurquées ou mobiles (« qui roulent »), qui augmentent le risque d’échec de ponction, d’hématome et d’inconfort pour le patient.9
- La veine basilique est située en dessous d’une artère et d’un nerf, de sorte qu’une piqûre à cet endroit peut provoquer une douleur ou endommager le nerf ou l’artère.
- La veine céphalique est souvent visible, mais peut être plus mobile. Elle peut constituer une alternative intéressante, notamment pour les patients musclés ou en surpoids.
- Laisser le bras du patient pendre vers le bas quelques instants (si la position le permet) augmente le retour veineux et facilite la visualisation des veines.
- Proposer au patient de serrer légèrement le poing ou d’effectuer quelques mouvements de pompage avec la main afin de faciliter le repérage des veines (uniquement pendant le temps nécessaire à leur identification).
- Effectuer une inspection visuelle et une palpation avec l’index, toujours avant l’antisepsie. La palpation doit rechercher une veine souple, élastique et non pulsatile.8
- Chez les personnes en surpoids, la veine céphalique ou les veines du dos de la main sont parfois plus accessibles que celles du bras.
- En cas de difficulté persistante, recourir à des dispositifs d’aide comme un vein finder, une lampe à infrarouge, un transilluminateur ou une échographie veineuse portable.
- Mobiliser un(e) professionnel(le) expérimenté(e) dès le départ, en cas d’antécédents d’échec de ponction, de chimiothérapie, de perfusions fréquentes, ou de fragilité veineuse connue.
- Si aucune veine des membres supérieurs n’est accessible, il est possible d’envisager exceptionnellement un prélèvement sur les veines des membres inférieurs.8
Retrait du garrot et application d’un anesthésique si nécessaire
Laissez suffisamment de temps à l’anesthésique pour agir : par exemple, 1 à 2 minutes pour le MEOPA. Pour les anesthésiques topiques comme le patch d’EMLA, prévoir au minimum 1 heure de pose (cf. notice du dispositif). Une bonne anticipation du soin est donc indispensable.
Étape 6 : réaliser le prélèvement veineux
Respect des règles d’hygiène
Il est primordial de se désinfecter les mains avec une solution hydroalcoolique de manière appropriée, au minimum avant et après avoir mis des gants à usage unique, et lors de l’entrée et de la sortie de la chambre du patient.
L’antisepsie du site de prélèvement est une étape indispensable pour prévenir le risque de contamination bactérienne, en particulier lors d’un prélèvement de flacon d’hémocultures. Elle doit être rigoureuse, standardisée et adaptée aux recommandations institutionnelles, et prendre en compte les éventuelles allergies du patient1 (alcool, chlorhexidine…).
Avant toute antisepsie, il est impératif de vérifier que la peau est propre, sèche et exempte de lésions. Le désinfectant utilisé doit être conforme au protocole de l’établissement : alcool éthylique à 70 %, chlorhexidine alcoolique ou une autre solution validée.4 Le produit doit être appliqué avec une compresse stérile à usage unique (certains établissements autorisent toutefois l’utilisation de compresses non stériles pour cette étape ; il convient alors de se référer systématiquement aux protocoles spécifiques en vigueur.).
Historiquement, une technique en spirale, du centre vers la périphérie ou de l’endroit qui sera ponctionné vers le haut de la veine, est recommandée5.8, avec trois passages successifs et en respectant strictement le temps de séchage. Actuellement, on parle de plus en plus d’une technique alternative en quadrillage, visant une antisepsie plus uniforme. Cependant, en l’absence d’études suffisamment robustes pour trancher définitivement, il convient de respecter les recommandations de votre établissement.
Lors d’un prélèvement standard :
- Antisepsie de la peau avec un seul tampon ou compresse stérile.
- Laisser sécher complètement le site pendant au moins 30 secondes, sans souffler ni agiter.
- Ne jamais repasser avec la même compresse.4
- Ne pas toucher la zone désinfectée une fois la désinfection effectuée.1
Il a été démontré que le non-respect des temps de contact ou la recontamination du site après désinfection sont des causes majeures de faux positifs en hémoculture ou de contaminations d’échantillons.4.10.11
Techniques pour insérer l’aiguille lors du prélèvement sanguin
Avant la ponction, installer un garrot à environ 5 à 10 cm au-dessus du site de ponction4, en veillant à ce qu’il ne reste pas en place plus d’une minute pour éviter toute hémoconcentration.
Selon les recommandations du CLSI GP41-A713, les gants à usage unique (conformes à la norme NF EN ISO 37414) doivent être enfilés avant tout contact avec le patient, donc avant la pose du garrot et la palpation de la veine. Cette précaution vise à respecter les mesures de prévention des infections et de protection du/de la professionnel(le).
De plus, mettre les gants après le garrot peut retarder la procédure, ce qui augmente le temps d’application du garrot, qui dure dans ce cas plus d’une minute15, ce qui favorise une stase veineuse et l’altération des résultats biologiques.
Cependant, en pratique, certaines équipes réalisent une première palpation sans gants pour faciliter le repérage des veines, en particulier chez les patients à veines difficiles.
Chaque établissement peut adapter ses protocoles internes en fonction de ses pratiques cliniques, de son évaluation des risques et de ses procédures d’hygiène.
Ne pas demander au patient de serrer le poing ni de laisser pendre le bras. Le bras doit rester détendu, en appui stable, paume tournée vers le haut.8 Le poing, s’il est fermé spontanément, doit être relâché au moment de la ponction.16
Tendre fermement la peau à l’aide du pouce, quelques centimètres sous le site d’insertion, afin de stabiliser la veine et d’éviter qu’elle ne roule. Ce geste améliore la précision de la ponction et limite l’inconfort. Il est également possible d’utiliser l’autre main en la plaçant sous le coude du patient pour maintenir la veine en douceur, en tirant légèrement la peau de chaque côté, pour une meilleure stabilité pendant la ponction.
Introduire l’aiguille dans le vaisseau avec prudence et détermination, dans le sens du retour veineux, biseau orienté vers le haut. L’insertion doit se faire à un angle compris entre 5 et 30 degrés, selon la profondeur de la veine. Veiller à ce qu’au moins 5 mm (0,5 cm) de l’aiguille soit engagés dans la lumière veineuse pour garantir sa stabilité.4
Arrêt de l’insertion de l’aiguille
Une fois l’aiguille insérée dans le vaisseau selon les règles de bonne pratique, il convient d’être attentif/attentive à l’apparition du reflux sanguin. Ce signe indique que la pointe de l’aiguille est bien située dans la lumière veineuse. Dès cette observation, cesser immédiatement l’avancée de l’aiguille pour éviter toute transfixion ou extravasation.
Maintenir fermement le porte-tube, en stabilisant sa main contre le bras du patient, permet de garder le site de ponction immobile pendant le prélèvement. Le poing du patient doit rester relâché à ce stade : un poing fermé augmente la pression intraveineuse et risque de fausser certains résultats biologiques, notamment le taux de potassium.
En l’absence de reflux après 1 à 2 cm d’insertion, un réajustement millimétrique peut être tenté, en déplaçant très légèrement l’aiguille vers l’avant ou l’arrière sans la retirer. Si le sang n’apparaît toujours pas, retirer le garrot, retirer complètement l’aiguille, comprimer le point de ponction, et envisager un autre site, en utilisant une nouvelle aiguille.Chez certains patients (en pédiatrie particulièrement), l’aspiration par tubes sous vide peut provoquer un affaissement veineux. Il est alors possible d’utiliser la technique à l’écoulement, sans vide, en recueillant le sang par gravité dans des microtubes. Cette méthode nécessite du matériel adapté et une formation spécifique au sein des services concernés.17.18
Retrait du garrot lorsque le sang commence à s’écouler
Il est important de retirer le garrot afin de ne pas dépasser la durée d’une minute.19 Maintenez bien l’aiguille et le corps de la pompe afin d’éviter qu’ils ne sortent de la veine.
Respect de l’ordre des tubes pour le prélèvement sanguin
L’ordre de prélèvement des tubes doit être respecté afin d’éviter toute contamination croisée, c’est-à-dire le transfert accidentel d’additifs d’un tube à un autre, ce qui pourrait fausser les résultats biologiques.
Une méthode simple pour le retenir est de suivre l’ordre alphabétique, à l’exception du tube gris qui est généralement utilisé en dernier et moins fréquemment : Bleu, Jaune, Rouge, Vert, Violet, (et finalement Gris.)Attention, les codes couleur peuvent varier d’un laboratoire à l’autre. Il est donc essentiel de consulter la fiche de prélèvement officielle de l’établissement avant de procéder
Un ordre de prélèvement inapproprié peut entraîner des contaminations croisées entre additifs, et fausser certaines analyses, notamment celles de la coagulation.
Donc, il est important de :
- Respecter l’ordre de prélèvement recommandé.
- Consulter le protocole du laboratoire en cas de doute.
Homogénéisation des tubes après le prélèvement sanguin
Il est essentiel de mélanger chaque tube en réalisant des mouvements amples, délicats et réguliers. Quel que soit le dispositif utilisé, la coagulation du sang prélevé commence immédiatement, avec l’apparition de microcaillots dans les 15 premières secondes. Il est fondamental de ne pas secouer les tubes de manière excessive.19
Additif ajouté au tube | Nombre de retournements |
Activateur de coagulation | 5 |
Citrate de sodium | 3 à 4 |
Autres anticoagulants | 8 à 10 |
Remplissage et transvasement des tubes sanguins
Il est impératif de remplir le tube citraté jusqu’à la marque indiquée, car il contient un volume précis d’anticoagulant. Les résultats attendus sont basés sur cette dilution. Si le sang est sur-dilué ou sous-dilué, cela conduirait à des résultats faussement normaux ou anormaux.
Il convient d’éviter de transférer le sang entre les tubes. Transvaser du sang d’un tube vert à un tube bleu introduit un autre anticoagulant qui perturbe les réactions chimiques et fausse les résultats. De même, si du sang est transvasé d’un tube violet à un tube vert, cela pourrait entraîner une augmentation artificielle du potassium et une diminution artificielle du calcium. Parfois, même le simple fait de prélever le sang dans un tube violet avant un tube vert peut entraîner le transfert d’une goutte d’EDTA dans le tube vert, et fausser les résultats.
Si le prélèvement sanguin est difficile sur un patient, il est préférable d’utiliser un tube pédiatrique et de le remplir à moitié, car il contient moitié moins d’anticoagulant. Il est déconseillé de transvaser du sang d’un tube bleu adulte mal rempli dans un tube pédiatrique, car cela pourrait également fausser les résultats.
Étape 7 : finaliser le soin et garantir la traçabilité du prélèvement
Retrait correct de l’aiguille après le prélèvement sanguin
Avant le retrait de l’aiguille, s’assurer que le garrot a bien été relâché pour éviter tout risque d’hématome. Retirer délicatement l’aiguille à l’aide d’une compresse, sans gestes brusques. En cas d’utilisation d’un dispositif à ailettes (de type « butterfly »), suivre les consignes du fabricant, en maintenant l’angle d’insertion jusqu’au retrait complet afin de limiter les traumatismes veineux. Ne jamais recapuchonner manuellement l’aiguille et éliminer immédiatement le dispositif dans le collecteur OPCT prévu à cet effet.
Si vous utilisez un dispositif à ailettes, voici la procédure à suivre :
Compression du point de ponction
Après avoir retiré l’aiguille, exercer une pression ferme sur le site de ponction avec une compresse propre, sans masser, afin de favoriser l’hémostase. Maintenir la pression pendant plusieurs minutes, selon le profil du patient (traitement anticoagulant, troubles de la coagulation, etc.). Une fois l’hémostase obtenue, poser un pansement adapté au type de peau et aux éventuelles allergies. Informer le patient qu’il pourra retirer le pansement après quelques heures et vérifier l’absence de saignement avant de quitter la pièce.
Gestion des déchets
Tous les déchets souillés par du sang (compresses, gants, tubulures) doivent être éliminés dans un collecteur DASRI (déchets d’activités de soins à risques infectieux). L’aiguille doit être jetée immédiatement après usage, sans être désassemblée, dans un collecteur OPCT (objet piquant coupant tranchant). Ne jamais manipuler une aiguille séparée de son support à mains nues : en cas de nécessité, utiliser une pince ou jeter l’ensemble directement dans le collecteur sécurisé.1
Les déchets non souillés ou faiblement souillés (emballages, matériel légèrement imbibé de sang) peuvent être déposés dans les poubelles DAOM (déchets assimilés aux ordures ménagères)20, selon les protocoles de l’établissement.
Pour une maîtrise complète du tri des déchets à l’hôpital, consultez le cours de l’UE 2.10 S1 sur la gestion des déchets sur la plateforme Réussis ton IFSI.
Procédures à suivre avant de quitter la pièce post-prélèvement sanguin
Avant de quitter la chambre, il est important de s’assurer du confort et de la sécurité du patient. Si besoin, l’aider à remettre les vêtements et réinstaller la personne dans une position confortable.Si le patient est hospitalisé, mettre la sonnette à proximité.
Offrir à l’enfant un geste de réconfort (parole bienveillante, félicitations) et, selon le contexte, lui donner un « diplôme de bravoure » ou un autocollant peut renforcer l’adhésion aux soins et valoriser sa coopération.
Remercier l’adulte pour sa collaboration et rester disponible pour toute question et tout inconfort signalés après le prélèvement.
Dans tous les cas, vérifier la bonne compréhension des explications données et rester attentif/attentive aux signes de malaise ou de douleur. Suggérer un temps de repos de 5 minutes après le prélèvement et ne pas hésiter à réévaluer la tension artérielle si une sensation de vertige, si une pâleur ou de la fatigue sont rapportées.
Étiquetage des tubes : réaliser cette étape immédiatement après le prélèvement, en présence du patient4, pour garantir la traçabilité. Vérifier la concordance des données avec le dossier : nom de naissance, nom usuel ou marital, prénom, date de naissance, heure du prélèvement, identifiant du professionnel préleveur.
Enfin, ranger le matériel utilisé, évacuer les déchets selon les filières appropriées, nettoyer le chariot ou le plan de travail, puis procéder à une hygiène rigoureuse des mains.
Traçabilité du prélèvement sanguin : obligations et bonnes pratiques
La traçabilité est une exigence réglementaire et un gage de sécurité pour le patient. Chaque acte de prélèvement sanguin doit faire l’objet d’une traçabilité rigoureuse dans le dossier de soins. Il convient de documenter :
- La réalisation effective du prélèvement.
- La date et l’heure de l’acte.
- L’identité du/de la professionnel(le) ayant effectué le soin.
- Les éventuels incidents ou réactions observés.
- L’étiquetage des échantillons et leur envoi au laboratoire.
Des transmissions claires, complètes et datées garantissent la continuité des soins et répondent aux exigences médico-légales.
Délai et transport
- Numération formule sanguine (NFS) : certains laboratoires recommandent un délai maximal de 6 heures à température ambiante, tandis que d’autres acceptent jusqu’à 24 heures.
- Vitesse de sédimentation (VS) : le délai d’acheminement peut varier de 4 heures à température ambiante à 24 heures dans d’autres cas.
- Glycémie : un laboratoire peut exiger un délai maximal de 2 heures avec un tube hépariné, tandis qu’un autre autorise jusqu’à 24 heures avec un tube fluoré.
- Potassium, LDH : les délais varient de 3 à 6 heures, avec des recommandations spécifiques pour une centrifugation rapide.
- ECBU sans conservateur : certains protocoles indiquent un délai maximal de 2 heures à température ambiante, tandis que d’autres permettent jusqu’à 24 heures à +4°C.
- Hémocultures : le prélèvement doit être acheminé au laboratoire dans les 2 heures (conservation à T° ambiante). Si ce n’est pas possible : max. 12h à T° ambiante (18-26°C), jamais au frigo.
Ces exemples démontrent l‘importance de consulter les protocoles de votre laboratoire pour garantir la qualité des échantillons et la fiabilité des résultats.
Non-conformité après le prélèvement sanguin
La non-conformité est la « non-satisfaction d’une exigence (écart constaté par rapport aux procédures, rédigées pour répondre à la norme) ».24
Les motifs de rejet d’un échantillon peuvent être regroupés en trois catégories principales :
- Critères administratifs :
Ces problèmes sont généralement liés à l’identification du patient, comme des erreurs, des omissions ou des incertitudes. Ils peuvent également concerner des formulaires d’échantillonnage incomplets, auxquels il manque des informations telles que le nom de la personne qui a prélevé l’échantillon, l’heure du prélèvement, les informations thérapeutiques, etc. - Critères qualitatifs :
Ces problèmes sont liés au non-respect des délais ou des températures requis, comme des tubes fondus ou des délais trop longs. Ils concernent également l’utilisation d’un tube inadapté pour l’analyse et le non-respect des recommandations pré-analytiques, comme le jeûne ou l’heure du prélèvement. - Critères quantitatifs :
Ces problèmes sont liés à des tubes mal remplis, comme des tubes citratés, ou à un nombre insuffisant de tubes, comme des tubes EDTA pour une numération formule sanguine, une hémoglobine glyquée, un groupe sanguin, etc.
Comment éviter les erreurs fréquentes ?
Un prélèvement sanguin fiable repose sur le respect strict des recommandations pré-analytiques. Toute erreur, même minime, peut altérer les résultats et compromettre l’interprétation médicale.
Identification du patient
Une identification erronée peut conduire à l’attribution de résultats à un mauvais patient, avec des conséquences diagnostiques et thérapeutiques graves.
- Vérification systématique à l’aide d’un document officiel (carte d’identité, bracelet hospitalier).
- Confirmation orale lorsque c’est possible.
Application du garrot
Un garrot laissé trop longtemps peut provoquer une stase veineuse, et modifier artificiellement les concentrations de certains analytes (augmentation du potassium, des protéines et de l’albumine).
- Ne jamais excéder une minute d’application.
- Relâcher le garrot dès le début du prélèvement pour éviter l’altération des résultats.
Manipulation de l’aiguille
Une mauvaise technique peut entraîner une perforation de la veine, un hématome ou une douleur excessive pour le patient.
- Angle d’insertion optimal entre 15 et 30°.
- Choix du calibre adapté à la taille du vaisseau et à l’examen prescrit.
Respect des conditions pré-analytiques
L’absence de respect des conditions préalables au prélèvement peut compromettre les résultats (glycémie, bilan lipidique, bilan hormonal).
- Vérification des exigences de jeûne selon l’examen demandé.
- Interrogation du patient sur une éventuelle prise médicamenteuse pouvant interférer avec l’analyse.
Sélection des tubes
Un mauvais choix de tube peut nécessiter un nouveau prélèvement, retarder l’analyse et exposer le patient à une procédure supplémentaire.
- En cas de doute, contacter le laboratoire avant le prélèvement.
- Vérification systématique de la correspondance entre la prescription et les tubes nécessaires.
Remerciements
Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à Isabelle BATAILLE (cadre de santé et formatrice en IFSI), Marielle LABORDE (formatrice en santé), Aude PALLIER (formatrice et référente en santé), Viviane CASSOTTI (hygiéniste), Badia JABRANE (directrice pédagogique) et Marouan BENNANI (médecin biologiste).
Chez Réussis ton IFSI, nous nous engageons à proposer des contenus d’une fiabilité inégalée. En complément de l’expertise interne de notre équipe habituelle, nous valorisons l’apport de professionnel(le)s extérieur(e)s qualifié(e)s qui enrichit nos articles de perspectives nouvelles et essentielles.
Sources
- Organisation mondiale de la Santé « Lignes directrices de l’OMS applicables aux prélèvements sanguins : meilleures pratiques en phlébotomie » 08/05/2013
- Lippi, G., Chance, J. J., Church, S., Dazzi, P., Fontana, R., Giavarina, D., Grankvist, K., Huisman, W., Kouri, T., Palicka, V., Plebani, M., Puro, V., Salvagno, G. L., Sandberg, S., Sikaris, K., Watson, I., Stankovic, A. K., & Simundic, A. M. (2011). Preanalytical quality improvement: from dream to reality. Clinical chemistry and laboratory medicine, 49(7), 1113–1126. https://doi.org/10.1515/CCLM.2011.600
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