La définition du recueil de données est : « outil d’évaluation qui intervient dans la démarche clinique. Il permet à l’infirmière d’identifier le(s) problème(s) de santé, réel(s), potentiel(s) ou hypothétique(s) à l’accueil d’une personne ou lors de la réévaluation du projet de soins personnalisé (raisonnement clinique). »1   

Le recueil de données est un élément essentiel de la pratique infirmière et une étape fondamentale du raisonnement clinique. Il consiste à rechercher, rassembler et trier l’ensemble des données sur le patient et sa singularité : ses ressentis, ses pathologies, ses habitudes, ses capacités, ses ressources (environnementales, familiales, financières, etc.). Il permet aux infirmier(e)s de comprendre de façon approfondie les besoins de leurs patients, d’élaborer des plans en sciences infirmières appropriés et de suivre l’évolution de l’état de santé des patients. La maîtrise du recueil de données est une compétence indispensable pour les étudiant(e)s en soins infirmiers, à acquérir tout au long de leur parcours à l’IFSI et lors de leurs stages, pour leur futur métier.

Dans cet article, vous découvrirez la complexité du recueil de données, son importance dans la démarche clinique infirmière, son application concrète dans la pratique quotidienne des soins infirmiers, ainsi que l’ensemble des outils généraux permettant de collecter les données cliniques. Nous aborderons aussi la pertinence du choix des données cliniques. Nous illustrerons cet article avec des conseils de professionnel(le)s de santé pour que vous puissiez facilement mettre ces principes en œuvre.

Infographie - guide infirmier le recueil de données (RDD)

Le recueil de données, pilier de la démarche clinique infirmière

En soins infirmiers, le recueil de données est un concept indispensable de l’élaboration du raisonnement de la démarche clinique infirmière. C’est un apprentissage au cœur de la profession infirmière dans le but de prendre soin du patient dans sa globalité. On le retrouve dans le décret de compétences pratiques : compétence n°1, intitulée « Évaluer une situation clinique et établir un diagnostic dans le domaine infirmier »2, en relation directe avec les autres compétences.

Le recueil de données est inscrit législativement dans la profession infirmière dans l’article R4311-1 du Code de la santé publique : « L’exercice de la profession d’infirmier ou d’infirmière comporte l’analyse, l’organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la contribution au recueil de données cliniques et épidémiologiques et la participation à des actions de prévention, de dépistage, de formation et d’éducation à la santé. »3

Il consiste à collecter l’ensemble des informations cliniques du patient sur le plan biologique, psychologique, social et culturel, dans le but de mieux le connaître et d’appréhender sa singularité dans un contexte de soins. Il permet également de concevoir et d’adapter un projet de soins pour le patient au quotidien, en collaboration avec lui et/ou son entourage et l’équipe pluriprofessionnelle, dont le résultat est une prise en soins infirmière adaptée et individualisée. En outre, il fournit un maximum de renseignements au médecin, ce qui lui permet d’orienter son diagnostic médical et de prendre des mesures au regard de la prise en charge du patient.

Le temps passé à recueillir les données cliniques garantit un résultat de qualité et l’exhaustivité du recueil. Même si cela paraît chronophage, plus l’infirmier(e) recueille de données issues des différentes situations cliniques rencontrées, plus le professionnel de santé a de possibilités d’identifier l’ensemble des problématiques et d’individualiser la prise en soins.

Dans le contexte des soins infirmiers, intégrer le recueil de données dans le raisonnement clinique partagé permet de prévenir toute redondance et omission de données cliniques pertinentes, en commençant systématiquement par les informations et les connaissances déjà enregistrées dans le dossier patient informatisé. Cette condition indispensable pour élaborer un raisonnement clinique s’appelle le réflexe clinique.

Lors de l’élaboration de la démarche clinique, l’infirmier(e) utilise des outils pour retranscrire les données cliniques et les informations utiles. Les grilles d’évaluation standardisées et les check-lists permettent de ne pas omettre d’informations importantes et garantissent une approche systématique et holistique du recueil de données.

À quel moment effectuer le recueil de données ? 

Le plus souvent, le recueil de données est fait dès l’entrée du patient dans le service, mais aussi avant l’hospitalisation, en consultation, etc.
Le recueil de données peut être en effet effectué à divers moments et est complété

  • Directement avec le patient lors d’un entretien clinique.
  • Avec sa famille, ses proches ou sa personne de confiance.
  • À partir de données cliniques et paracliniques.
  • À partir d’informations transmises par d’autres professionnel(le)s de santé. Une approche multidisciplinaire au niveau du recueil de données garantit que tous les aspects de la santé et du bien-être du patient sont pris en compte. 
  • Par d’autres professionnels de la santé et d’autres personnes, tels que les kinésithérapeutes, les secrétaires médicales, les assistant(e)s sociaux ou encore les diététicien(ne)s. 

Il s’ajuste en permanence grâce à l’équipe pluriprofessionnelle. Il ne s’effectue pas en une seule fois, mais doit au contraire être complété dès qu’il y a une modification ou une information utile à la prise en soins du patient. 

Afin d’obtenir l’ensemble des données cliniques, l’infirmier(e) effectue un entretien clinique auprès du patient et de son entourage : 

  • en le(s) questionnant sur divers sujets liés à son histoire de santé, à savoir les données subjectives (ou symptômes), 
  • et en s’appuyant sur l’examen physique avec les données objectives (ou signes cliniques) : les problèmes de santé actuels, les antécédents personnels et familiaux pertinents, l’environnement social et physique, les traitements actuels, etc. 

L’objectif est d’évaluer l’état de santé du patient en recueillant diverses données qui permettent de déterminer ses besoins de santé, de garantir une surveillance clinique adaptée, d’évaluer les soins administrés tout au long du processus thérapeutique. Ces données sont partagées avec l’ensemble de l’équipe pluriprofessionnelle.

Les outils pour un recueil de données efficace

Des outils standardisés permettent de recueillir les données afin d’élaborer une évaluation clinique précise et de communiquer efficacement avec les autres professionnel(le)s de santé. Ces outils garantissent également l’uniformité de recueil et de transmission des informations. 

L’ensemble des données médicales et paramédicales se retrouvent en grande majorité dans le dossier du patient, ainsi que dans les courriers d’entrée, le compte-rendu, les prescriptions médicales et la fiche de liaison IDE. Toutefois, visualiser seulement ces données serait restrictif, car cela n’apporterait qu’une partie des données et ne permettrait pas d’effectuer un raisonnement clinique pertinent. Cela ne permettrait pas en conséquence de prodiguer des soins adaptés au patient. L’utilisation des techniques de communication empathique et active facilite la mise en place d’une relation de confiance et encourage le patient à partager des informations vitales pour son diagnostic et sa prise en soins. Le patient est acteur de sa santé et partenaire lors de sa prise en soins.4

L’infirmier(e) utilise un ou des outils de recueil de données, le plus souvent approuvés par l’établissement de santé : 

Les outils d’évaluation globale du patient :

  • Les 14 besoins fondamentaux de Virginia Henderson : il s’agit de la liste de 14 besoins qui permettent de réfléchir à la cause (lié à…) et à l’expression de ce déficit (se manifestant par…). Vous pourrez trouver l’ensemble des informations dans notre guide infirmier : les 14 besoins de Virginia Henderson.
  • Louis et ses 14 catégories5 : outil pédagogique simple, intuitif et très visuel. Souvent utilisé en complément des modèles conceptuels existants, il a pour objectif de simplifier l’organisation du raisonnement clinique afin de faciliter l’analyse de la situation de soins. Il s’appuie sur des spécialités paramédicales et médicales et adopte une approche globale des problématiques de santé en visualisant les caractéristiques du corps entier. 
  • Le modèle trifocal d’Arlette Marchal et Thérèse Psiuk permet de classer les informations de l’analyse de données en 3 domaines cliniques impliquant différents niveaux de responsabilité pour l’infirmier(e) :
    • les hypothèses de pathologies/les problèmes de santé réels ou potentiels ;
    • les risques et les complications liés à la pathologie et aux effets indésirables des traitements ;
    • les réactions humaines regroupant également les capacités et les ressources de la personne. 

Centrée sur la personne, cette vision de l’ensemble des problèmes et des interactions entre eux oriente et structure la pensée et le raisonnement clinique de l’IDE. Vous retrouverez l’ensemble des informations sur cette thématique dans notre guide infirmier : le raisonnement clinique.

Les outils d’évaluation de la douleur : 

Il existe de nombreuses échelles de la douleur à adapter au patient et au contexte pour garantir une évaluation précise et efficace. Par exemple : 

  • EVA6 (échelle visuelle analogique) : outil unidimensionnel d’auto-évaluation qui permet de mesurer l’intensité de la douleur. Elle est recommandée en première intention pour les patients communicants, adultes ou enfants à partir de 5 ans. 
  • EN7 (échelle numérique) : outil d’auto-évaluation de la douleur comportant 11 niveaux de 0 à 10. C’est un outil sensible, reproductible, fiable et validé pour évaluer la douleur, aiguë ou chronique. Le professionnel de santé demande  au patient d’évaluer verbalement sa douleur sur une échelle allant de 0 (« pas de douleur ») à 10 (« douleur la plus intense imaginable »).
  • EVS8 (échelle verbale simple) : elle permet de mesurer l’intensité de la douleur des personnes, le plus souvent âgées, n’arrivant pas à l’évaluer avec l’EVA et l’EN. Elle permet d’apprécier la douleur ressentie du patient par paliers de 0 à 4.
  • L’échelle Doloplus9 : échelle d’évaluation comportementale de la douleur chronique de la personne âgée présentant des troubles de la communication verbale.
  • L’échelle Algoplus10 : échelle d’évaluation comportementale de la douleur aiguë de la personne âgée présentant des troubles de la communication verbale.
  • L’échelle BPS (Behavioral Pain Scale)11 : cette échelle comportementale de la douleur est utilisée dans les services de réanimation pour le patient sédaté et ventilé. Elle comporte 3 critères : l’expression du visage, le tonus des membres supérieurs et l’adaptation au respirateur, qui donnent un score total de 3 à 12. Plus le score est élevé, plus le patient est algique. 
  • L’échelle COMFORT12 : échelle d’hétéro-évaluation, le plus souvent utilisée dans les services de réanimation pédiatrique, pour évaluer la douleur post-opératoire ou non et la sédation du nouveau-né (utilisable jusqu’à l’adolescence) peu communiquant ou comateux, sous respirateur, sédaté. Elle comporte 8 items dont 3 physiologiques et, pour chaque item, 5 cotations de 1 à 5, correspondant à une intensité croissante des symptômes. 
  • L’échelle EDIN (Échelle Douleur Inconfort Nouveau-né)13 est une échelle d’hétéro-évaluation utilisée pour mesurer la douleur et l’inconfort chez les nouveau-nés hospitalisés. Cette échelle est particulièrement utile pour les nouveau-nés prématurés et à terme, hospitalisés en néonatologie ou en réanimation néonatale. L’EDIN comporte 5 items observables : visage, corps, sommeil, relation, et confort. Chaque item est coté de 0 à 3, correspondant à une intensité croissante de la douleur ou de l’inconfort. Un score total élevé indique une douleur ou un inconfort important nécessitant une intervention.
  • L’échelle DN414 : il s’agit d’une échelle d’auto-évaluation permettant d’estimer la probabilité d’une douleur neuropathique. Le patient doit répondre à chaque item des 4 questions ci-dessous par “oui” ou “non”.
infographie - l'échelle visuelle analogique

Les outils d’évaluation de l’autonomie/de la dépendance :

  • L’échelle ADL15 (Activities of Daily Living) : l’échelle des activités de la vie quotidienne (également appelée échelle de Katz) permet d’évaluer le degré d’autonomie du patient de manière objective dans les activités de la vie quotidienne. Cette échelle tient compte de l’hygiène corporelle, de l’habillage, de la capacité à se rendre aux toilettes, des transferts, de la continence et de la prise des repas. Un sujet âgé dont le score est inférieur à 3 est considéré dépendant.
  • L’outil ICOPE16 (Integrated Care for Older People) : outil de dépistage multidimensionnel consistant à évaluer six capacités intrinsèques déterminantes d’une personne, à savoir : la mobilité, la vitalité, la capacité neurosensorielle (la vue et l’ouïe), le bien-être psycho-social, la cognition (orientation temporelle et mémoire) et la locomotion (vitesse de marche).
  • La grille AGGIR17 (Autonomie Gérontologique Groupes Iso-Ressources) : la grille AGGIR définit le profil de dépendance d’un sujet âgé (appelé groupe iso-ressource : GIR). La dépendance est évaluée selon le niveau de demande de soins. Elle prend en compte la cohérence de la personne, son orientation, la réalisation de la toilette, l’habillage, l’alimentation, l’élimination, les transferts et les déplacements intérieurs. Cette échelle permet de déterminer si une personne peut bénéficier ou non, et à quel niveau, de la prestation spécifique dépendance (PSD).
  • Le modèle PATHOS18 : consiste à identifier sur un thésaurus de 50 états pathologiques, toutes les pathologies dont souffre la personne âgée le jour de l’évaluation. Chaque état pathologique présenté est qualifié par un des 12 profils de soins possibles indiquant les soins requis par l’état pathologique compte tenu du contexte clinique.
Infographie - La grille AGGIR

Les outils d’évaluation du risque d’escarre :

  • L’échelle de Braden19 : développée par Barbara Braden et Nancy Bergstrom en 1987, ensuite validée par la Haute Autorité de Santé (HAS). Cette échelle est claire et simple d’utilisation pour évaluer les facteurs de risque liés aux escarres. Elle prend en compte six critères principaux :
    • la perception sensorielle, 
    • l’exposition à l’humidité, 
    • l’activité, 
    • la mobilité, 
    • la nutrition et
    • la friction/le cisaillement.
  • L’échelle de Norton20 : est utilisée pour les patients de plus de 65 ans. Elle prend en compte cinq critères principaux, mais ne tient pas compte de l’état nutritionnel du patient. Plus le score est faible, plus le risque d’apparition d’escarres est important.
  • L’échelle de Waterlow21 : développée par Judy Waterlow en 1985, cette échelle prend en compte plusieurs facteurs de risque liés aux escarres. Elle est utilisable pour tous indépendamment de l’âge, ce qui en fait un outil polyvalent et adaptable.

Les outils d’évaluation de la nutrition : 

  • MNA®22 (Mini Nutritional Assessment) : outil conçu pour identifier les personnes de plus de 65 ans en situation de dénutrition, ou qui risquent de le devenir, avant qu’elles ne subissent une perte de poids importante ou un changement du taux de protéines sériques.
  • IMC23 (indice de masse corporelle) : indice qui permet d’estimer la corpulence d’une personne. Il est utilisé pour le suivi nutritionnel, pour l’adaptation des posologies de certains traitements et peut participer au diagnostic de certaines pathologies : dénutrition, pathologies cancéreuses… L’IMC est exprimé en kilogrammes par mètre carré (kg/m²).

Les outils d’évaluation spécifiques : 

  • L’échelle de Glasgow24 : également connue sous le nom de score de Glasgow (Glasgow Coma Scale, GCS), elle permet d’évaluer l’état de conscience d’un patient, en particulier après un traumatisme crânien. 
  • L’échelle de Cushman25 : outil utilisé pour évaluer le syndrome de sevrage alcoolique. Il repose sur l’évaluation de plusieurs critères, dont la fréquence cardiaque, la pression artérielle systolique, les tremblements, les sueurs, l’agitation et les troubles sensoriels.
  • L’échelle Stratify26 : outil de dépistage utilisé pour évaluer le risque de chute, en particulier pour les personnes âgées. Elle comprend cinq facteurs de risque de chute indépendants. Les critères évalués incluent l’agitation, les troubles visuels, les antécédents de chute, la fréquence des déplacements aux toilettes et la mobilité.
Infographie - le score de Glasgow

Quelles données recueillir ?

Il est important de distinguer les données pertinentes des informations non essentielles

  • Exemple pertinent : la mobilité réduite d’un(e) patient(e) nécessite une attention particulière, car elle peut avoir une influence sur la stratégie de soins (chambre plus grande, placement du mobilier adapté, matériel nécessaire aux transferts…).
  • Exemple non pertinent : la couleur des cheveux d’une patiente n’a pas de pertinence clinique pour sa prise en soins. 

Afin de faciliter l’interprétation et l’utilisation des données, il faut les classer méthodiquement. Plusieurs méthodes existent, dont la méthode MTVED (maladie, traitements, vécu, environnement et développement). Cependant, certains établissements ont des spécifications propres. En effet, le recueil de données doit être adapté aux pathologies et aux contextes cliniques (urgence, pédiatrie, gériatrie). Vous pourrez trouver à la fin de l’article deux guides de recueil de données cliniques : l’un dédié aux adultes et l’autre aux enfants. 

Voici les données cliniques à recueillir : 

1) L’identification du patient

    Dans le cadre de la pratique infirmière, le respect de l’anonymat et de la confidentialité des patients est primordial. Ainsi, lors de la collecte de données, certaines informations sont recueillies, mais ne doivent pas être divulguées, comme le nom et le prénom du patient/résident, ainsi que son âge et son numéro de chambre. Cependant, d’autres informations, comme la date de naissance, ne sont pas nécessaires et peuvent être omises pour préserver l’anonymat du patient. Il est toutefois important de vérifier la concordance des informations (nom-prénom-date de naissance) afin de garantir l’identito-vigilance. Cette approche garantit le respect des droits du patient.

    • Données cliniques : nom, prénom, date de naissance (garantissant l’identito-vigilance, mais à ne pas communiquer ni mettre dans votre démarche clinique), âge, paramètres vitaux et autres données (pouls, tension artérielle, température, douleur, saturation en oxygène, fréquence respiratoire, douleur, glycémie, diurèse, transit, élimination, thymie…).
    • Outils utilisés : dossier du patient, compte-rendu médical, fiche de liaison IDE, entretien accompagné d’un questionnaire, thermomètre, saturomètre, tensiomètre, échelle de douleur adaptée, dossier du patient, hémoglucotest.
    • Collaboration professionnelle et autres : patient, famille/entourage, médecin.

    2) Le motif d’hospitalisation 

      Le motif d’admission et le diagnostic médical à ce jour permettent de comprendre l’état de santé actuel du patient. Les modalités d’entrée, qu’elles soient programmées, en urgence, à la suite d’une consultation ou spontanées, constituent le contexte de la situation du patient, ainsi qu’une piste de réflexion sur son état psychologique. En effet, une hospitalisation programmée est plus ”acceptable” qu’une hospitalisation en urgence. La date d’entrée dans la structure et la durée du séjour (en jours) permettent de suivre le parcours du patient au sein de l’établissement. Les événements ayant motivé l’entrée et une histoire succincte du problème de santé donnent une vue d’ensemble de sa situation médicale. 

      • Données cliniques : motif d’admission, diagnostic médical à ce jour, événements ayant motivé l’entrée, histoire succincte du problème de santé. Modalités d’entrée : programmée, en urgence, à la suite d’une consultation, spontanée…
      • Outils utilisés : entretien, dossier médical, fiche de liaison IDE.
      • Collaboration professionnelle et autres : patient, famille/entourage, médecin.

      3) La situation sociale et professionnelle du patient

        La présentation de la situation sociale et professionnelle d’un patient est à prendre en compte dans le cadre des soins infirmiers. Cela comprend le contexte familial, social, professionnel, culturel et spirituel du patient, ainsi que ses habitudes de vie. Ces dernières peuvent inclure ses occupations, son régime alimentaire, son hygiène et la texture de ses repas.

        En outre, la couverture sociale du patient, son assurance complémentaire, les aides à domicile dont il bénéficie, la personne à prévenir et la personne de confiance sont également des informations pertinentes. Il est également important de connaître la protection juridique du patient (tutelle/curatelle) et ses directives anticipées.
        Connaître le contexte social d’une personne nous aide à comprendre certaines de ses préoccupations et inquiétudes. Par exemple, un artisan peut s’inquiéter du fait qu’il ne reçoit pas de salaire lorsqu’il ne travaille pas. De même, une personne âgée hospitalisée peut être préoccupée par le fait que son conjoint dépendant reste seul à domicile.

        Pour la pédiatrie, il est particulièrement important de recueillir l’histoire de la grossesse. Cette donnée peut fournir des informations précieuses sur la santé et le développement de l’enfant.

        • Données cliniques : telles que la distance de son domicile à l’hôpital ou la présence d’escaliers chez lui. Contexte familial, social, culturel et spirituel de la personne. Ressources financières, couverture sociale, assurance complémentaire, aides à domicile, personne à prévenir et personne de confiance, protection juridique (tutelle/curatelle), directives anticipées. Activité professionnelle : emploi actif, retraité(e), conditions de travail. Habitudes de vie : addiction (tabagisme, alcoolisme…), alimentation, activité physique, occupations, hygiène de vie.
        • Outils utilisés : entretien, observation, famille/entourage, dossier du patient.
        • Collaboration professionnelle et autres : patient, entourage, assistant(e) social(e).

        4) Les caractéristiques physiques et psychologiques

          Les caractéristiques physiques et psychologiques d’un patient sont à prendre en compte dans le cadre des soins infirmiers. Sur le plan physique, il est nécessaire de faire une « photographie de la personne » incluant des informations telles que le poids et la taille du patient (permettant de calculer l’IMC), la présence de lunettes, de prothèses auditives ou dentaires, de dispositifs médicaux (lunettes à oxygène, stomie…), l’utilisation d’un déambulateur ou d’une canne, l’existence de handicaps, les aides nécessaires, le mode de déplacement, l’autonomie du patient et sa capacité de déglutition.

          Noter des caractéristiques distinctives, telles qu’une cicatrice, un tatouage, un piercing ou la couleur des cheveux peut être pertinent. Par exemple, il n’est pas nécessaire de mentionner que les cheveux d’une dame de 82 ans sont blancs, car c’est une information logique qui n’ajoute pas de valeur à sa description. Cependant, dans un service d’oncologie, il est important de connaître la couleur des cheveux d’une patiente, pour pouvoir lui proposer une perruque qui lui ressemblera si besoin. De même, il peut être utile de mentionner une cicatrice sur le visage. L’essentiel est d’identifier quand ces informations sont pertinentes au regard de la prise en soins du patient et de son contexte d’hospitalisation.

          Sur le plan psychologique, il est important de considérer les fonctions cognitives du patient, son état psychologique, son attitude, sa capacité de communication, son comportement et sa façon de vivre la situation. En outre, des événements antérieurs à l’hospitalisation peuvent influencer l’état psychologique de la personne, comme la date d’anniversaire d’un décès d’un proche, difficile à gérer, en particulier lorsqu’on est hospitalisé(e). 

          • Données cliniques : « Photographie de la personne » : IMC (poids + taille), lunettes, prothèses auditives/dentaires, mobilité, aides matérielles (déambulateur, canne…) handicaps, aides nécessaires, mode de déplacement, autonomie, capacité de déglutition, etc. Humeur (thymie), capacités cognitives, état psychologique, attitude, communication, comportement, vécu de la situation.
          • Outils utilisés : observation, tests physiques et psychologiques, entretien.
          • Collaboration professionnelle et autres : patient, famille/entourage, kinésithérapeute, ergothérapeute, médecin, psychologue, aide-soignant(e), diététicien(ne), orthophoniste, dossier patient, fiche de liaison IDE.

          5) Les antécédents et les traitements 

            Les antécédents (ATCD) d’un patient sont des données cliniques à absolument prendre en compte lors de son admission dans une structure de soins, qu’ils soient médicaux ou chirurgicaux. Ils peuvent être liés au motif d’entrée du patient, et entraîner le besoin d’une surveillance infirmière particulière pendant le séjour, ou être pris en soins à ce jour. Par exemple, il n’est pas nécessaire de mentionner qu’un patient de 78 ans a subi une appendicectomie de nombreuses années auparavant. En revanche, si l’opération a eu lieu récemment, il est pertinent de la signaler et de prévoir une surveillance spécifique.

            Il peut exister un lien de cause à effet entre les antécédents et les événements ayant motivé l’entrée du patient. Par exemple, un problème de santé ancien et majeur, sans traitement, mais nécessitant une attention ou une surveillance particulière, peut être à l’origine de l’admission.

            La notion de durée de traitement et de vaccination est également importante, tout comme le nom de la classe pharmacologique et les effets indésirables des médicaments que le patient prend ou a pris.

            Il est possible d’organiser les antécédents de deux façons : du plus récent au plus ancien, ou de les classifier par systèmes anatomiques. Ces organisations donnent une vue globale de l’évolution de l’état de santé du patient. L’objectif est de disposer d’une vue d’ensemble de la situation médicale du patient, afin d’adapter les soins.

            • Données cliniques : antécédents chirurgicaux ou médicaux, pathologies récentes et actuelles. Antécédents nécessitant une attention et une surveillance clinique et/ou biologique. Les traitements en lien avec les antécédents et/ou avec les  problèmes de santé actuels/potentiels. Nom de la classe pharmacologique, notion de durée de traitement et surveillances cliniques et biologiques à faire (principaux effets indésirables, efficacité thérapeutique). 
            • Outils utilisés : dossier du patient et comptes-rendus médicaux, entretien.
            • Collaboration professionnelle et autres : patient, famille/entourage, médecin.

            6) Le résumé du séjour depuis l’entrée jusqu’à ce jour

              Le séjour du patient dans la structure ou l’unité de soins est marqué par plusieurs faits ou événements marquants. Depuis son entrée jusqu’à ce jour, il a connu une série d’événements qui ont influencé son parcours de soins. Ces événements peuvent inclure des changements d’état de santé, des interventions médicales ou chirurgicales, des interactions avec le personnel soignant, des moments de répit et de récupération.

              L’évolution de la situation et de la connaissance du patient est également à prendre en compte. Cela peut impliquer des améliorations ou des détériorations de son état de santé, des changements dans son plan de soins, ou des ajustements des traitements médicamenteux.

              7) Le devenir 

                Le devenir du patient/résident est une donnée clinique majeure dans le cadre des soins infirmiers permettant la projection de la prise en soins d’ici la fin du séjour et au-delà. C’est une estimation basée sur l’évolution de l’état de santé du patient, les progrès réalisés et les objectifs de soins.
                Le devenir du patient se décompose en 3 temporalités :

                • À court terme : l’objectif est de stabiliser l’état de santé du patient, de gérer les symptômes immédiats et de mettre un plan de soins adapté en place.
                • À moyen terme : l’accent est mis sur la réhabilitation et l’amélioration de la qualité de vie du patient. Cela peut impliquer des ajustements du plan de soins, l’introduction de nouvelles thérapies et l’adaptation des traitements.
                • À long terme : l’objectif est de maintenir l’état de santé du patient, de prévenir les complications et de promouvoir une vie aussi autonome et épanouissante que possible.

                Enfin, l’avenir de la personne et l’évolution de son état de santé impliquent un suivi régulier, une évaluation continue et une adaptation des soins en fonction des besoins changeants du patient sur le plan médico-biologique, psychologique, socioprofessionnel, environnemental et financier. C’est un engagement à long terme qui nécessite une collaboration étroite entre le patient, sa famille et l’équipe de soins.

                • Données cliniques : projection de la prise en soins d’ici la fin du séjour et au-delà. Avenir de la personne, suivi de l’état de santé.
                • Outils utilisés : dossier du patient, entretien.
                • Collaboration professionnelle et autres : réunion pluri-professionnelle, patient.

                Exemple de personnalisation du devenir :

                Pour un patient de 50 ans, gaucher, victime d’un accident du travail nécessitant l’amputation de plusieurs membres, vivant dans un village éloigné, la planification du devenir doit être extrêmement détaillée. Voici des exemples :

                • Court terme : contrôle de la douleur, prévention des infections, planification des bilans sanguins et des premières interventions kinésithérapeutiques.
                • Moyen terme : adaptation du traitement anti douleur post-séances de kinésithérapie, essais de prothèses, réadaptation fonctionnelle, éducation thérapeutique du patient et du proche aidant.
                • Long terme : évaluations régulières pour ajuster le plan de soins, accompagnement psychologique pour le patient et sa famille, adaptation du logement et réflexion sur une éventuelle reconversion professionnelle.

                Ces présentations sont modulables et certains plans peuvent ne pas être envisagés, comme dans les cas de diagnostics de maladies dont l’évolution est incertaine, où les temporalités peuvent être limitées.

                Il est important de préciser que l’ensemble des données que vous allez recueillir n’est pas pertinent si vous ne faites pas les liens entre elles et l’ensemble des compétences infirmières. Dans le métier d’infirmier(e), il est essentiel d’avoir une posture réflexive et intellectuelle et d’établir les liens cohérents entre savoir, savoir-être et savoir-faire. 

                Infographie - Le recueil de données (RDD) - Quelques conseils de formateurs en IFSI

                Conseils de formateurs/formatrices

                Thérèse Psiuk

                Il est important de distinguer le recueil de données pertinentes lors des études pour diverses évaluations du recueil de données dans le cadre d’un raisonnement clinique partagé. Il faut éviter de poser constamment les mêmes questions au patient. Un lien de confiance se crée lorsque l’on entre dans une chambre en partageant d’abord les informations recueillies dans le Dossier Patient Informatisé (DPI), sans demander à nouveau au patient la raison de sa présence. Cela permettra de développer une observation ciblée basée sur les hypothèses dans la démarche clinique.

                Patricia Niant

                Un conseil primordial à retenir dès que vous entrez dans la chambre d’un patient ou d’un résident est l’importance de l’observation. Prenez un moment pour visualiser l’environnement en quelques coups d’œil ; cela peut vous fournir des informations essentielles avant même de commencer à recueillir les données.

                Isabelle Raffin-Bataille

                Je vous conseille de mettre à jour votre recueil de données régulièrement et de le partager avec les professionnels. Ce document est essentiel, non seulement pour les unités d’enseignement 3.1 et 3.2, mais il profite également à toute l’équipe durant votre stage. De plus, dès votre premier semestre, essayez d’expliquer comment, quand et où vous avez réalisé ce recueil de données, et avec quels outils. Cela nous permettra de travailler ensemble sur l’analyse des données recueillies.

                Yves Ustariz

                Le recueil de données est un outil précieux pour identifier les problèmes du patient, individualiser les soins, et c’est aussi une approche permettant de commencer une relation de soins centrée sur la personne soignée. Il s’agit donc de connaître à la fois ses difficultés, mais aussi ses ressources, sur lesquelles nous pourrons nous appuyer dans les soins.

                Karine Colas

                Le recueil de données est un outil incontournable visant à l’amélioration de l’organisation des soins infirmiers. Les infirmiers sont en première ligne dans l’évaluation initiale de la personne soignée et de son entourage. La qualité et la sécurité de l’accompagnement infirmier passe notamment par le recueil de données à actualiser et il engage, en équipe, la responsabilité pluri professionnelle. La nécessité de recueillir des données exhaustives et fiables en s’appuyant sur le principe de transversalité,  en vue de les analyser pour adapter les soins à la personne correspond à la première étape de la démarche clinique. Le raisonnement clinique, processus intellectuel organisé de la pensée, a donc été identifié comme un élément incontournable de cette démarche, qui contribue à la construction du processus de soin, et qui sous-tend les actions infirmières. Les outils de recueil de données sont à sélectionner en fonction du contexte de soins, des besoins de santé et des inférences de l’infirmier. Exemples d’outils : SAED de l’HAS, AMPLE, MOQET, ABCD. Pensez également à renseigner la personne de confiance, le mode de protection juridique, la personne à prévenir, les directives anticipées voire les autorisations parentales, des juges ou des tuteurs.

                Vers une amélioration continue du recueil de données

                En conclusion, le recueil de données joue un rôle fondamental dans le processus de soins infirmiers. Il constitue la base sur laquelle repose l’évaluation clinique du patient, la planification des soins, la mise en œuvre d’actions et de soins et l’évaluation, mais aussi l es réajustements nécessaires. Sans un recueil de données précis et complet, la qualité des soins peut être compromise, et cela peut entraîner des négligences et des risques importants pour l’état de santé du patient. Par conséquent, il faut constamment approfondir et affiner ses compétences infirmières afin d’effectuer le recueil de données le plus pertinent possible. Cela nécessite une formation continue, une pratique réfléchie et une volonté d’apprendre. En fin de compte, un recueil de données efficace améliore la prise en soins des patients et renforce la qualité des soins infirmiers. Continuons donc à nous efforcer d’exceller dans cette compétence !

                Remerciements

                Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à Thérèse Psiuk (ancienne directrice d’IFSI et auteure d’ouvrages sur le raisonnement clinique),  Patricia NIANT (cadre supérieure coordinatrice IFSI/IFAS), Isabelle Raffin-Bataille (cadre de santé formatrice en IFSI), Karine Colas (cadre de santé formatrice en IFSI) et Yves Ustariz (cadre de santé formateur en IFSI) pour leur relecture attentive de cet article et pour leur précieuse contribution.

                Chez Réussis ton IFSI, nous nous engageons à proposer des contenus d’une fiabilité inégalée. En complément de l’expertise interne de notre équipe habituelle, nous valorisons l’apport de professionnels extérieurs qualifiés qui enrichissent nos articles de perspectives nouvelles et essentielles.

                Sources

                1. Lescure, S. (2022). Fiche 1. Le recueil de données cliniques. Dans : , Réussir tout le Diplôme infirmier en 500 fiches de révision – IFSI (pp. 538-538). Paris: Vuibert. 
                2. Berger-Levrault « Recueil des principaux textes relatifs à la formation préparant au diplôme d’État et à l’exercice de la profession – Profession Infirmier » Paru le 17/08/2023
                3. Code de la santé publique « Article R4311-1 » Version en vigueur depuis le 08/08/2004
                4. Lefort, Hugues & Psiuk, Thérèse. (2019). Patient partenaire, patient expert. De l’accompagnement à l’autonomie.
                5. Loïc Martin « Louis et ses 14 catégories : un outil au service du raisonnement clinique » 01/2015
                6. Hôpitaux universitaires de Genève « Échelle visuelle analogique » 25/04/2016
                7. Hôpitaux universitaires de Genève « Échelle numérique » 25/04/2016
                8. Hôpitaux universitaires de Genève « Échelle verbale simple » 25/04/2016
                9. Association Doloplus « The Doloplus Scale » consulté le 26/05/24
                10. Association Doloplus « The Algoplus Scale » consulté le 26/05/24
                11. Centre Hospitalier Universitaire de Toulouse « Échelle BPS » 11/03/2009
                12. Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier « Échelle COMFORT » 18/05/2009
                13. Centre Hospitalier Universitaire de Toulouse « Grille de douleur et d’inconfort du nouveau né (EDIN) » 07/09/2001
                14. Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier « Échelle DN4 » 14/05/2012
                15. Agence Régionale de Santé « Échelle d’autonomie » modifié le 10/05/2019
                16. Agence Régionale de Santé « ICOPE – Un programme pour prévenir la dépendance » 13/06/2023
                17. Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie « Comment fonctionne la grille AGGIR ? » modifié le 06/07/2022
                18. Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie « Le modèle “PATHOS” » 27/10/2022
                19. Coloplast « Échelle de Braden » 20/05/2021
                20. Coloplast « Échelle de Norton » 20/05/2021
                21. Coloplast « Échelle de Waterlow » 20/05/2021
                22. Nestlé nutrition Institute « Mini Nutritional Assessment MNA® » modifié le 28/05/2021
                23. Hôpitaux universitaires de Genève « Calcul de l’IMC » modifié le 30/11/2021
                24. Société française de médecine d’urgence « Le score de Glasgow » consulté le 26/05/2024
                25. Institut Robert Debré « Utilisation de la grille de CUSHMAN dans le sevrage simple d’alcool » 29/11/2011
                26. Hôpitaux universitaires de Genève « Chutes : évaluation du risque et recommandations de prévention » 07/08/2019