L’élaboration de la démarche clinique infirmière en 5 étapes
L’élaboration de la démarche clinique infirmière s’effectue en plusieurs étapes étroitement liées : le recueil de données avec les 14 besoins fondamentaux de Virginia Henderson (ou autre théorie de soins choisie par votre IFSI ou votre service), l’analyse clinique de ces données en s’appuyant sur le raisonnement clinique dont l’aboutissement est un jugement clinique pouvant être formulé sous forme de diagnostic infirmier, le projet de soins et la planification des soins.
Étape 1 : le recueil de données
Le recueil de données est un pilier fondamental de la pratique infirmière et du raisonnement clinique, il s’agit de la première étape de l’élaboration de la démarche clinique. Il implique la recherche, la collecte et le tri de toutes les données cliniques pertinentes concernant la personne soignée et sa singularité : ressentis, pathologies, antécédents, habitudes, capacités et ressources (environnementales, familiales, financières, etc.). Ce processus permet aux infirmier(e)s de comprendre de façon approfondie les besoins de leurs patients, de concevoir des plans de soins adaptés et de suivre l’évolution de l’état de santé des patients. La maîtrise du recueil de données est une compétence essentielle des étudiant(e)s en soins infirmiers, à développer tout au long de leur formation à l’IFSI et lors de leurs stages. Voici le PDF téléchargeable du recueil de données.
Les 14 besoins fondamentaux, formulés par Virginia Henderson, constituent une théorie de soins qui offre une méthode pour organiser et interpréter les observations. Il s’agit de l’un des outils de données utilisés par certains établissements. Bien que cet outil soit le plus fréquemment cité, ce n’est ni la seule ni la plus récente des théories de soins. Cette théorie permet aux soignant(e)s de personnaliser les soins, de promouvoir l’indépendance des patients et d’améliorer leur qualité de vie.
Aujourd’hui, les 14 besoins fondamentaux de Virginia Henderson sont utilisés comme support, comme outil de recueil de données et d’analyse, souvent en lien avec l’anamnèse, généralement à l’entrée de la personne dans le service. Cela permet d’élaborer un jugement clinique et de mettre en œuvre une prise en soins individualisée et personnalisée.
Ils constituent un cadre de référence pour les étudiant(e)s en santé, et leur permettent de comprendre et de raisonner en créant des liens entre les signes et symptômes et les attentes du patient, à satisfaire de manière holistique. Ce modèle contribue à la formation de professionnel(le)s de santé compétent(e)s et empathiques, capables de prodiguer des soins de qualité et de prendre en compte le patient dans sa globalité.
Ce modèle bio-psycho-social englobe tous les aspects de la vie de la personne soignée. Chaque besoin influence les autres, et la perturbation de l’un d’eux peut entraîner un problème de santé. En se basant sur ces besoins, l’infirmier(e) détermine si le patient a des problèmes de santé et les réactions humaines qui peuvent en découler.
Étape 2 : l’analyse clinique
Avant toute prise de décision et mise en place d’actions et de soins, l’infirmier(e) met en place une évaluation clinique de tous les patients du service.
Cette évaluation s’effectue après un recueil de données et un examen structuré de l’état physique et/ou mental de la personne, afin de dépister des écarts par rapport à la norme. Ensuite, l’infirmier(e) examine, analyse la situation clinique de manière objective, en faisant des liens entre les renseignements recueillis auprès de la personne et/ou de sa famille et ses connaissances théoriques : c’est le principe du raisonnement clinique. Cette opération de réflexion permet d’aboutir à un jugement clinique en identifiant les problèmes de santé réels et/ou potentiels.
Cette analyse conduit le/la professionnel(le) à passer de la théorie à la pratique, en adaptant ses actions et ses soins pour prendre en soins la personne soignée de la manière la plus appropriée et personnalisée possible, dans le cadre du projet de soins. Le raisonnement clinique aboutit ainsi à un jugement clinique, essentiel pour une prise en soins individualisée et efficace.
Pour faciliter la présentation du patient et l’utilisation des données de façon adaptée, il faut les classer méthodiquement par catégories. Plusieurs méthodes existent, dont la méthode MTVED (maladie, traitements, vécu, environnement et développement). Cependant, certains établissements utilisent leurs propres méthodes. Nous vous proposons cette organisation pour votre démarche clinique :
- L’identification du patient.
- Le motif de son hospitalisation.
- Sa situation sociale et professionnelle.
- Ses caractéristiques physiques et psychologiques.
- Ses antécédents et traitements.
- Le résumé du séjour depuis l’entrée jusqu’à ce jour.
Cette clarification des données vous permettra d’effectuer une analyse clinique, en suivant le modèle clinique trifocal d’Arlette Marchal et de Thérèse Psiuk qui vous aidera à « classer » les informations de l’analyse de données afin de préparer en avance la prise en soins du patient selon les problèmes et les risques. Ce modèle vous aidera à centraliser les données afin de faire des choix pour le projet de soins.
Étape 3 : le diagnostic infirmier
L’aboutissement de l’analyse clinique est le jugement clinique, qui peut être formulé sous forme de diagnostic infirmier. Dans le domaine des soins, le diagnostic infirmier et sa formulation nécessitent une compréhension approfondie du problème de santé du patient. Ce diagnostic permet d’organiser les connaissances infirmières, la recherche et la réflexion. Le raisonnement clinique, un processus cognitivo-comportemental, intervient à chaque étape de la démarche clinique infirmière, notamment en ce qui concerne les diagnostics. Il s’agit d’une approche centrée sur la personne soignée, qui prend en compte les symptômes physiques ainsi que les aspects psychologiques, sociaux et émotionnels.
Bien que peu utilisé par les infirmier(e)s, le diagnostic infirmier est un outil de réflexivité essentiel, intimement lié à la planification des soins. Son exactitude et sa pertinence dépendent des connaissances théoriques et de l’expérience du/de la professionnel(le). Pour les étudiant(e)s en soins infirmiers, il s’agit d’un travail de réflexion complexe, qui consiste à circonscrire les réactions humaines des patients.
Il est important d’impliquer le patient, ainsi que sa famille et/ou son entourage, lors de l’élaboration du diagnostic infirmier. Cette approche participative renforce la relation soignant-soigné et favorise l’adhésion aux plans de soins. Le diagnostic infirmier permet de prodiguer des soins personnalisés et adaptés aux besoins du patient.
Étape 4 : le projet de soins
Après avoir identifié les enjeux de santé du patient, l’infirmier(e) peut élaborer un projet de soins avec l’équipe soignante pluridisciplinaire, en collaboration avec la personne soignée et/ou sa famille. Il est basé sur les problèmes de santé identifiés, les capacités et les ressources de la personne soignée et de ses proches. Les actions à mettre en place sont identifiées et négociées, puis réparties au sein de l’équipe pluriprofessionnelle selon les rôles de l’infirmier(e) (propre, prescription, collaboration). Ce projet de soins est un processus dynamique qui évolue et s’ajuste en fonction de l’état de santé, des besoins et des souhaits de la personne soignée. Il est établi pour une durée variable selon la situation.
Le projet de soins est un plan structuré et personnalisé qui guide les professionnel(le)s dans la prise en soins globale de l’individu. Il repose sur une évaluation approfondie de ses besoins et a pour objectif d’offrir des soins de qualité, adaptés et centrés sur le patient. Ce projet implique une collaboration étroite entre le patient, sa famille et les soignant(e)s, en prenant en compte les aspects médicaux, psychologiques, sociaux et spirituels de la personne soignée. Le projet de soins représente l’aboutissement du travail effectué lors de l’utilisation du modèle clinique trifocal. Il synthétise les choix issus du raisonnement clinique, inclut les problèmes médicaux, les antécédents, les risques et les diagnostics infirmiers.
Étape 5 : la planification des soins
La planification des soins permet d’organiser et de programmer les interventions en fonction du temps disponible pour un individu ou un groupe dans une unité de soins. Elle est indispensable dans le secteur de la santé, car elle offre à chaque membre de l’équipe une vision globale des soins à prodiguer. Cette planification nécessite une anticipation détaillée des étapes, des actions à entreprendre, des ressources à mobiliser et des précautions à prendre pour garantir la sécurité et l’efficacité des soins.
Cependant, la planification des soins dépasse la simple organisation des tâches. Elle exige une réflexion critique et une structuration des interventions en tenant compte du projet de l’établissement, du projet médical et du projet de soins infirmiers. Cette planification doit être en accord avec les objectifs du service et centrée sur l’individu.
Dans le domaine de la santé, chaque professionnel(le) apporte son expertise, qu’il/elle soit médecin, infirmier(e), pharmacien(ne), aide-soignant(e) ou ergothérapeute… Cette diversité enrichit l’approche des soins et conduit à une prise en soins plus complète. Toutefois, elle peut aussi représenter un défi en ce qui concerne la coordination, l’organisation et la planification des soins. Les enjeux quotidiens des professionnel(le)s, tels que la charge de travail, le manque de ressources et les difficultés de communication, peuvent entraver une planification des soins efficace. Il faut donc prendre en compte ces enjeux pour optimiser l’utilisation des ressources, améliorer la coordination entre les professionnel(le)s et la qualité des soins prodigués.
Enfin, le patient doit être considéré comme un partenaire, car sa collaboration est essentielle pour la planification de l’ensemble des soins.